27.10.17

DES FLEURS PAR MILLIERS

Cette année 2017 sera celle d'un profond bouleversement dans le monde des iris. Barry Blyth, le talentueux hybrideur australien a décidé de se retirer ! Lui qui enregistrait, ces temps derniers, une quarantaine de nouvelles variétés chaque année cesse toute activité. Il a déjà bazardé tout ce qu'il avait en observation en vue de prochains enregistrements au profit de Thomas Johnson, à Salem dans l'Oregon, où tout a été remis en culture. Au revoir, Barry, vous avez bien mérité le repos auquel vous aspirez. Et de toute façon, votre ami Keith Keppel continuera de vous offrir l'hospitalité chaque printemps pour que vous ayez encore l'occasion d'effectuer encore quelques croisements !

Cette retraite est ici un prétexte pour examiner quelques importantes réussites dans ce que Barry Blyth a créé. Dans l'immense travail effectué, nous retiendrons trois étapes importantes, trois moments fondamentaux d'une production exceptionnelle.

'Snowlight' et les amoenas 

Nous commencerons, au tout début de la carrière d'hybrideur de Barry Blyth, par ce qui l'a fait immédiatement connaître de l'irisdom : les amoenas jaunes. En baptisant lui-même 'Echo de France', en 1984, l'une de ses variétés emblématiques, Pierre Anfosso a rendu hommage à Blyth et ses tout premiers amoenas jaunes, et, en particulier à 'Snow Light' (1972), qui est le parent féminin de 'Echo de France'.

De 'Snowlight', première étape, on passe à 'Alpine Sunshine' (1975), pur amoena jaune, et à 'Tranquil Star' (1978) aux pétales un peu plus crémeux. De ce dernier on atteint le magnifique 'Alpine Journey' (1983), à peine plus clair au bord des sépales, et à 'Breezes' (1991) aux barbes plus vives. Du précédent on découvre 'Neutron Dance' (1987), parfait à tous points de vue, et 'Snow d'Or' (1991), tellement proche de 'Alpine Journey'.

Peu à peu Blyth s'est éloigné de la simplicité de ses débuts et dirigé vers des bicolores originaux, multiples, en utilisant notamment maintes fois un croisement ((Alpine Journey x Beachgirl) x ((Beachgirl x (Tranquil Star x Coral Strand)) x (Persian Smoke x Chimbolam))) qui lui a donné plein de variétés excellentes.

(Dance Man X Rembrandt Magic)

L’un des traits qui caractérisent Barry Blyth est de constituer, à partir d’un croisement prolifique, une véritable famille de frères de semis. Il a été question ci-dessus du croisement ((Alpine Journey x Beachgirl) x ((Beachgirl x (Tranquil Star x Coral Strand)) x (Persian Smoke x Chimbolam))), mais il y a encore mieux ! La famille dont il va être question maintenant est encore plus nombreuse puisqu’elle comprend dix frères de semis. Il s'agit du croisement (Dance Man X Rembrandt Magic).


'Dance Man' (1989) est un iris jaune profond, plus clair sous les barbes qui sont jaune d’or. Il est l’alliage d’un jaune, Speculator (Ghio, 1982), et d’un orange bitone, 'Orangerie' (Keppel, 1982). On retrouve cet 'Orangerie' dans le pedigree de 'Rembrandt Magic' (1992), associé à Edna’s Wish (Gibson, 1983), rose saumon, et à 'Light Beam' (Lesley Blyth 85), « plicata » jaune-brun. 'Rembrandt Magic' est une variété très originale, dans les tons, rares chez les iris, de brun café clair, à barbes moutarde.

Avec les dix variétés issues de ce croisement, on se rend vraiment compte de la diversité des couleurs que l’on peut trouver dans les rangs d’un même semis. 'Apricot Danish' (1996), est rose orangé, ou abricot rosé, avec une zone plus claire sous les barbes, mandarine. 'Chesnut Avenue' (1994), comme son nom le sous-entend, est un brun noisette plus doré aux épaules et légèrement lavé de mauve sous les barbes moutarde. 'Covet Me' (1994) est entièrement jaune d’or, y compris les barbes. 'Goldie the Pirate' (1996) est proche du précédent, mais en plus orangé. En revanche, 'Inner Journey' (1995) se rapproche de 'Chesnut Avenue', dans un coloris plus vif, cependant. 'Letter From Paris' (1997) est le dernier à avoir été enregistré ; il se présente en rose dragée, avec un spot blanc sous les barbes qui sont mandarine. 'Plume d'Or' (1994) n’est pas le plus original de la famille, cependant c’est celui qui a eu lui-même la plus belle descendance. Son coloris, du modèle « Joyce Terry », est composé de pétales d’un jaune légèrement rosé, au-dessus de sépales blancs, liserés du jaune des pétales, avec des barbes de cette même couleur. Couleur qu’on retrouve chez 'Stillness' (1995) mais les bords des sépales restent blancs, alors que les épaules sont, cette fois, nettement dorées ; les pétales s’ouvrent un peu, alors que chez les autres ils restent turbinés. 'Venus Butterfly' (1994) est habillé de mauve rosé, le centre des sépales, plus clair, s’agrémente d’une flamme bleutée. Enfin 'Zillionnaire' (1996), le petit dernier, donne dans le jaune d’or, vieil or, même, sur les sépales, avec une barbe moutarde, héritée de 'Rembrandt Magic'. Cela donne une idée de la variété des coloris qui apparaissent chez Blyth. Chaque année c'est une réjouissance de voir ce que donne son intarissable fantaisie.

 La quête de l'inaccessible

 On vient de voir combien Barry Blyth est attaché à la découverte de nouvelles associations de couleurs dans des variétés auxquelles il ajoute des caractéristiques particulières comme les fleurs bouillonnées qui ont actuellement tant de succès. L’un des coloris qui lui tient le plus à cœur concerne les iris aux pétales blancs et aux sépales roses. Mais l’amoena rose parfait serait-il inaccessible ? Blyth lui-même, à la toute fin de sa carrière, n’est pas encore tout à fait satisfait de ce qu'il a obtenu. Pourtant ses efforts ont été multiples et prolongés.

Cela a commencé dès que Barry Blyth a vu 'Sunset Snows' (Stevens, 1963) et qu’il a ressenti le désir de rechercher un iris parfaitement blanc aux pétales et richement rose aux sépales. Il a multiplié les croisements, souvent audacieux, obtenu une multitude de semis dont plusieurs iris blanc/rose, mais il est toujours dans l’attente de ce qu’il imagine comme la perfection car si, du côté de la couleur, ses efforts son prometteurs, il faut aussi que les qualités horticoles de la plante soient à la hauteur, et jusqu'ici cela n'a pas été le cas. Il faut dire que ‘Sunset Snows’, l’une des dernières obtentions de la Néo-zélandaise Jean Stevens, disparue en 1967, a atteint d'emblée un sommet ! Mais ce sommet avait aussi ses imperfections : fleurs petites et sans ondulations, développement végétatif exubérant (et par conséquent touffes rapidement trop denses pour obtenir une floraison agréable et prolongée). Corriger tout cela sans perdre l'essentiel, tel est le défi que Blyth tente toujours de surmonter.

Parmi tous ces essais on trouve plusieurs variétés aux pétales blancs surmontant des sépales orangés ou rosés : ‘Beachgirl’ (Blyth, 1983), ‘Love Chant’ (Blyth, 1979), ‘Festive Skirt’ (Hutchings, 1974), ‘Amber Snow’ (Blyth 1987), ainsi qu’un certain ‘Tranquil Star’ dont il a été question ci-dessus qui, pour ne pas présenter ces couleurs, possède un ancêtre, ‘Outer Limits’ (Blyth, 1972), qui descend directement de ‘Sunset Snows’. Si l’on cherche bien, on découvre que ce ‘Sunset Snows’ est aussi présent dans l’arrière plan de ‘Beachgirl’ (par l’intermédiaire de ‘Twist and Shout’), ‘Festive Skirt’, ‘Amber Snow’ ou ‘Love Chant’.

Curieusement ce que Blyth considère comme sa meilleure approche de l'amoena blanc/rose est 'Adorée' (2006) qui est un bicolore aux pétales mauves et aux sépales rose orangé ! C'est sur cette variété qu'il compte pour atteindre son but. A l'heure actuelle il n'en est plus loin (voir le superbe 'Bashful Love' (2014). Mais réussira-t-il ? Il faut le lui souhaiter, et ce vœu sera aussi un bonheur pour les collectionneurs.

Iconographie : 


 'Snowlight' 


'Chesnut Avenue' 


'Twist and Shout' 


'Bashful Love'

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