16.9.16

IRIS D'ALLEMAGNE

La culture et l'hybridation des iris a une longue tradition en Europe centrale et, en particulier, en Allemagne. Comment ignorer en effet l'activité de l'entreprise Goos et Koenemann depuis les années 1880 jusqu'à la seconde guerre mondiale ? Après celle-ci, les noms de Eva Heimann, Peter Werckmeister, Rudolph Hanselmayer, Werner Dorn, Hertha Van Nes, Max Steiger et Victor Von Martin, ont été connus et appréciés de tous ceux qui, en Europe au moins, s'intéressaient aux iris. Celui de la comtesse Von Zeppelin et de sa pépinière ont, eux, acquis une réputation mondiale à un moment où ce qui provenait d'Allemagne n'avait pas toujours bonne presse, ce qui heureusement allait bientôt s'effacer. Aujourd'hui les hybrideurs allemands, nombreux, ont rejoint la catégorie des meilleurs, et leurs produits sont maintenant distribués aux USA, en concurrence avec ceux des producteurs autochtones. Nous allons faire un petit tour chez nos voisins pour avoir une meilleure connaissance de cette partie du monde des iris. 

 I. Au commencement 

La chronologie nous amène à commencer ce tour d'horizon par la firme Goos et Koenemann. Il s'agit de l'entreprise de deux amis qui, dès les années 1880, ont uni leurs compétences pour créer et faire prospérer une vaste pépinière située dans la vallée du Rhin, pas très loin de Wiesbaden. Max Goos était le gestionnaire (il a fait des études de comptabilité) et le technicien de l'association (avec une profonde curiosité pour tout ce qui concerne l'horticulture). August Koenemann était le commercial de l'entreprise. Il avait un réel talent pour la vente et la publicité. Max Goos avait commencé l'hybridation des iris dès le début des années 1880 et, avant de se lancer dans les grands iris, il s'était intéressé aux variétés naines. La collaboration des deux amis a duré jusqu'en 1910 et la mort prématurée de August Koenemann. Par la suite, Max Goos s'est débrouillé tout seul mais à partir de 1912 il s'est adjoint les compétences de l'horticulteur Friedrich Bücher, et l'année suivante son fils Hermann est entré dans l'affaire avant, hélas d'être tué pendant la guerre, en1916. La firme G&K a continué jusqu'au cataclysme de la deuxième guerre mondiale en mettant sur le marché de nombreux et excellents iris, qui ont conquis le monde entier et se rencontrent encore fréquemment ici et là. Dans cette production exceptionnelle il faut retenir les noms de 'Trautlieb' (1899) – rose clair marqué de blanc sous les barbes - 'Pfauenauge' (1906) – pétales jaune ivoire veinés de brun-rouge, sépales violets bordés de jaune - 'Loreley' (1909) – pétales jaune pâle, sépales rouge violacé largement veinés de blanc et liserés de jaune – 'Rhein Nixe' (1910) – pétales blancs, sépales indigo liserés blanc et barbes jaunes – 'Rheintraube' (1920) – néglecta bleu violacé – ou encore 'Rheingauperle' (1924), délicat rose-mauve. Toutes ces variétés poursuivent la lignée des iris diploïdes et, malgré la qualité de ses cultivars, l'erreur commise par G&K est sûrement de n'avoir pas pris le virage de la tétraploïdie. 

Après 1945 la culture des iris a repris peu à peu. Elle fut le fait de jardiniers amateurs qui, par la suite, se sont enhardis et ont développé leurs affaire jusqu'à devenir, pour certains de véritables spécialistes. Néanmoins la production allemande est restée purement nationale et essentiellement artisanale : les variétés qui ont été enregistrées sont peu nombreuses. Ce n'est que dans les années 1980 que les obtenteurs germaniques ont osé affronter la domination presque écrasante aux États-Unis et des grandes exploitations agricoles où l'on cultive des milliers de variétés d'iris. 

De la période considérée on peut retenir par exemple : 
- 'Goldfackel' (Steffen, 1955) – deux tons de jaune ; 
- 'Farbenspiel' (Dorn, 1958) – pétales jaune d'or, sépales bruns avec spot lilas 
- 'Karin von Hugo' (von Martin, 1958) – rose tendre à barbe minium ; 
- 'Fleissige Liesl' (Hanselmeyer, 1961) – rose dragée, barbes rouges ; 
- 'Oma's Sommerkleid' (von Martin, 1967) – blanc crémeux, tache mauve sur les sépales. 

Une mention particulière doit être faite de Hertha van Nes, une dame qui, bien entendu, a elle-même quelque peu hybridé, mais qui est plutôt une théoricienne de l'hybridation. 

Dès le début des années 1980 on constate un changement dans le comportement des obtenteurs allemands. Non seulement le nombre des variétés nouvelles croît considérablement, mais la qualité des produits s'améliore et ils ont de plus l'avantage d'une meilleure adaptation aux conditions climatiques européennes, et l'on voit apparaître de véritables professionnels. La première à se signaler est la Berlinoise Eva Heiman. Nous lui devons le violet profond 'Berliner Nacht' (1980), descendant de 'Matinata', ou 'Berlin Ice' (1984), blanc bleuté, qui a figuré au catalogue de Grafin Von Zeppelin, et de bien d'autres beaux iris. Pour les années suivantes il convient de les subdiviser en quatre périodes : Les années 1980 proprement dites ; les années 1990 ; le début du 21e siècle et la période actuelle. Toutes cependant se signalent par le fait que les obtenteurs se plient scrupuleusement aux règles internationales d'enregistrement, prennent part à certains concours internationaux, commercialisent leurs obtentions soit par vente directe, soit par l'intermédiaire de pépiniéristes-producteurs ; la seule différence avec ce qui se passe dans les grandes nations irisariennes c'est que les iris allemands ne sont guère distribués par les pépinières autres qu'allemandes, ce qui limite leur diffusion et nuit à leur renommée. A noter cependant que depuis très peu de temps quelques pépinières américaines (Stout, Filardi...) ont mis des variétés allemandes à leur catalogue. Mais rien de tel en France où les grands producteurs, frileux dans la diversité de ce qu'ils proposent, ne vendent guère, outre leurs propres obtentions, que des variétés américaines ou australiennes. 

(à suivre...) 

Illustrations : 


- 'Goldfackel' (Steffen, 1955)  - auteur du cliché non identifié

 - 'Karin von Hugo' (von Martin, 1958) 


 - 'Fleissige Liesl' (Hanselmeyer, 1961) 


 - 'Berliner Nacht' (Heiman, 1980)

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