28.11.14

DE L'UTILITÉ DES COMPÉTITIONS

Un message reçu récemment a annoncé la reprise du concours d'iris de Florence, après une année d'interruption. Dès 2016, donc, après une profonde réorganisation, le magnifique jardin florentin sera le lieu où se confronteront une centaine de variétés parmi les plus récentes et les plus valeureuses. C'est une excellente nouvelle. Car les compétitions, quelles qu'en soient les conditions, ont un intérêt essentiel à mon avis pour l'appréciation des progrès de l'hybridation. Plus elles sont nombreuses, donc, plus ces progrès pourront être jugés. Aux États-Unis la compétition est partie intégrante de la vie du monde des iris. Dès qu'une variété est mise sur le marché, elle entre dans l'immense course aux honneurs qui peut la conduire jusqu'à la consécration suprême qu'est la Médaille de Dykes. C'est pourquoi la date d'introduction est au moins aussi importante que la date d'enregistrement, et, souvent, est considérée comme la véritable date de naissance d'une variété. Les nombreux juges inscrits sur les registres de l'AIS vont avoir a donner leur avis sur les variétés dont on leur aura fourni la liste et qu'ils verront dans les jardins dispersés sur l'ensemble du territoire. On a beaucoup glosé sur l'importance d'une bonne distribution pour qu'une variété récolte des suffrages et se place dans la course, c'est effectivement un problème, et certains ont proposé un système différent d'appréciation, mais quoi qu'il en soit toutes les nouveautés recevront, plus ou moins, des notes qui les placeront dans la hiérarchie. Les collectionneurs, tout comme les obtenteurs, auront rapidement connaissance de ce qui se fait, des progrès réalisés et de l'opinion que les juges auront de ces progrès. Cela fonctionne très bien et dès qu'une nouvelle couleur ou qu'un nouveau modèle apparaît, l'émulation qui existe entre hybrideurs fait que chacun désire montrer son savoir faire et met sur le marché de nouvelles variétés voisines de celles qui ont initialement présenté la couleur ou le modèle. Les progrès vont très vite. Un bel exemple de cela a été l'apparition puis le foisonnement d'iris du modèle « distallata » en un nombre très réduit d'années. Entre 'Prototype' (2000) ou 'Quandary' (2001) et 'Spring Madness' (2009) ou 'Insaniac' (2012), il ne s'est écoulé qu'une décennie. Désormais ce modèle est un classique. Le cas des amoenas inversés est à peu près identique.

Aux États-Unis, donc, le moyen de se mesurer existe et fonctionne correctement. Mais qu'en est-il ailleurs dans le monde et, singulièrement, en Europe ? Pas de course aux honneurs. Mais, heureusement, quelques compétitions. Du modèle de celle de Florence ou de FRANCIRIS, ou de celui de Munich ou de Moscou. Dans chacun de ces différents endroits, chaque printemps, ceux qui le veulent peuvent envoyer leurs variétés en vue de les confronter à celles de leurs confrères qui ont fait la même démarche qu'eux. La compétition peut être exclusivement nationale ou ouverte aux hybrideurs du monde entier. C'est dans cette configuration qu'elle est le plus intéressante.

Ces trois ou quatre concours devraient attirer un grand nombre d'obtenteurs européens puisque ceux-ci n'ont pas d'autre moyen de faire évaluer objectivement leur travail et de le comparer à celui des autres. Pourtant les compétiteurs européens sont le plus souvent minoritaires, même si l'espèce de sous-estimation ou de modestie mal placée qui les amenait à minimiser la qualité de leur travail et à penser qu'ils n'avaient aucune chance en face des Américains ou des Australiens a tendance à disparaître ( ce qui a fait émerger des hybrideurs italiens aux derniers concours de Florence). Il est donc souhaitable que les obtenteurs européens – et français en particulier – soient le plus nombreux possible à participer aux concours. Leurs obtentions sont maintenant, à mon avis, en état de se mesurer à celles des obtenteurs du monde entier et tout spécialement aux Américains qui ont fait jusqu'à présent figure d'épouvantails. C'est ce que je pense, mais ce n'est qu'à la suite de confrontations internationales qu'on en aura la certitude. Je suis convaincu que dès à présent des hybrideurs comme Bernard Laporte, Sébastien Cancade, Daniel Borys, Jean-Claude Jacob ou Alain Chapelle ont toutes leurs chances en compétition, mais en plus en se rendant sur place (comme on allait jadis à la foire ou au comice agricole) ils auraient la possibilité de voir ce que font les autres et d'en tirer de précieux enseignements. Il est certain cependant que la survenue de ces compétitions au moment de la floraison dans leurs propres jardins peut poser des problèmes, mais cela n'est pas toujours le cas : Florence se déroule avant le pic de floraison en France, Munich ou Moscou se situent bien après... Un autre inconvénient est le coût d'un déplacement lointain. Il est évident que cela complique les choses. C'est même la difficulté majeure de ces comparaisons qui peuvent se faire au contact avec ce que les autres ont créé. Cela restera l'obstacle à une émulation européenne susceptible d'amener rapidement l'iridophilie de notre vieux continent au niveau de ce qui se réalise dans les pays qui ont pris l'avance que l'on connaît. Cependant restons optimistes et comptons sur les concours en Europe pour faire progresser les obtenteurs européens.

Illustrations : 


'Insaniac' (T. Johnson, 2012) (Bright Sunshiny Day sib X Painter’s Touch) 


'Alta Marea' (Bianco, 2003) (Aldo Ratti sib x(Glory Story x Shipshape)) 

 'Cadran Lunaire' (Jacob, 2012) (Slovak Prince X Starring) 


semis Laporte 06-33-14 - (inconnu X (Honky Tonk Blues x Decadence))

1 commentaire:

Seb a dit…

Pour ma part, et même si j'essaie d'assister au concours FRANCIRIS du mieux possible, le coût est le principal frein à mes déplacements. Si l'on veut vivre l'évènement du mieux possible il faut participer à tous les micro évènements qu'ont prévus les organisateurs (restaurants, sorties, etc etc,.... ) ce qui représente une somme d'argent non négligeable.
De plus si l'on ne parle pas très bien anglais on est également pénalisé, difficile en effet de suivre des conversations souvent techniques dans la langue de Shakespeare.
J'en connais qui ne peuvent aussi se permettre de quitter leur jardin par peur de zapper leur propre floraison, un moment court dans l'année qu'on ne peut oublier.

Il n'empêche que je garde un merveilleux souvenir de FRANCIRIS 2011 ou effectivement on apprend énormément au contact des juges, le raconter en quelques lignes serait forcement trop court alors un conseil, ne loupez pas FRANCIRIS 2015.