28.3.14

REINES DE LA NUIT

Elles n'apparaissent pas dans « La Flûte Enchantée » mais dans bon nombre de nos jardins. Elles ne chantent pas des airs périlleux de colorature, mais elles fleurissent chaque printemps, pour notre plus grand bonheur. Si elles sont noires, ce n'est pas la colère qui leur donne cette couleur mais les aléas de croisements savamment organisés. Elles, ce sont des variétés d'iris noires (ou presque). Elle vont nous accompagner pendant quelques semaines. 

2. NUITS FRANÇAISES

En dehors des Anfosso, les obtenteurs français ne s'intéressent pas beaucoup aux iris noirs. Dans les dernières décennies, celui qui s'est le plus attaché à cette couleur, c'est Gérard Madoré. Mais depuis peu Richard Cayeux s'y est mis. On peut attendre de lui des iris splendides, comme il sait les produire.

'Armorique' (Madoré, 2005) ((Before the Storm x Night Ruler) X Hello Darkness) 

'Penhir' (Madoré, 2001)(Hello Darkness X Before the Storm) 


'Eclipse de Mai' (Cayeux R. 2009)(Dusky Challenger X ((semis x Romantic Evening) x (semis x Romantic Evening))) 


'Nuit Satinée' (Cayeux R. 2013)(de Badlands et Black Suited) 

A L'OMBRE D'UN GÉANT

Dans un univers aussi restreint que celui des iris, comment peut-on exister, professionnellement, dans l'ombre d'un confrère qui occupe tout le terrain ? C'est la question qu'on peut se poser à propos des hybrideurs et producteurs d'iris qui ont eu la malchance de se trouver en concurrence avec Ferdinand Cayeux, au cours du premier tiers du XXe siècle. Leur situation avait de quoi les décourager quand on constate le succès planétaire de leur éminent confrère dont la réputation internationale attirait chaque année de nombreux amateurs étrangers dont certains faisaient la traversée de l'Océan Atlantique pour admirer les variétés créées à la pépinière du Petit Vitry.

En fait, chacun avait trouvé une façon de se distinguer ! Nous allons suivre le parcours de chacun des principaux confrères de Ferdinand Cayeux et voir de quelle façon ils avaient réussi à se faire une place plus ou moins grande au soleil.

La famille Verdier. 

C'est assurément la plus ancienne « maison » d'iris qui était encore en activité quand F. Cayeux est entré dans la carrière. Elle a été créée par Victor Verdier au milieu des années 1800, et s'est perpétuée en la personne des deux fils de ce dernier, Charles et Eugène jusqu'à la guerre de 1914. A ce moment c'est la Maison Vilmorin qui a racheté la collection d'iris, une des plus importantes qui aient jamais été réunie, et qui a mis sur le marché les derniers produits des frères Verdier. Les variétés signées Verdier apparues dans les quinze premières années du siècle dernier rivalisaient effectivement avec celles obtenues par les autres hybrideurs. A commencer par 'Edouard Michel' (1904) qui possède la particularité d'être l'un des premiers iris triploïdes à avoir été commercialisés. Dans son livre « Classic Irises and the Men and Women who Created Them », Clarence Mahan se demande pourquoi cette variété a rencontré un tel succès car il considère qu'il s'agit d'une fleur « old fahion », c'est à dire avec des pétales qui ne se tiennent pas et des sépales qui pendent an oreilles de cockers. Parmi les autres variétés Verdier qui ont eu un réel succès, il faut citer 'La Neige' (1912), un iris blanc très blanc, et 'Prosper Laugier' (1914), bitone brun-rouge clair.

Charles André. 

L'activité de celui-ci est plus confidentielle. Pour se distinguer (ou peut-être, tout simplement, parce que cela lui plaisait) il s'est attelé à la recherche d'iris nains. Et il a eu la satisfaction d'obtenir, dans les années 1920, deux variétés qui ont fait sa célébrité, 'Lieutenant de Chavagnac' et 'Jean Siret'. Le premier est dans les tons de violet, le second dans les tons de jaune. L'un et l'autre sont à la fois nains (on dirait aujourd'hui des SDB) et remontants !

Fernand Denis. 

Cet ingénieur installé à Balaruc les Bains (tout près de l'actuelle pépinière des Iris de Thau) à eu le bonheur d'utiliser, parmi les premiers, les iris tétraploïdes du Proche Orient (I. mesopotamica) pour améliorer les anciens iris diploïdes exploités depuis toujours. L'opération n'a pas été des plus simples, mais elle a réussi et c'est grâce à cette « révolution tétraploïde » que l'iridophilie a pu atteindre son niveau actuel. L'activité de Fernand Denis ne s'est pas limitée aux grands iris, il a exploré bien d'autres domaines, comme celui des arilbreds ou celui d'autres croisements interspécifiques comme sa variété 'Paltec', issue d'un croisement entre I. pallida et I. tectorum. Dans le domaine des grands iris certaines de ses variétés sont à retenir : 'Madame Claude Monet' (1911), 'Madame Chobaut' (1916) et 'Blanc Bleuté' (1922), ancêtre de 'Missouri' (DM 1937), 'Chivalry' (DM 1947) et 'Blue Sapphire' (DM 1958).

Armand Millet et fils. 

L'entreprise de la famille Millet eut une existence fort longue et pleine de succès. Au début du 20eme siècle elle était toujours florissante et faisait la réputation de Bourg La Reine, cité où elle était installée. D'ailleurs Armand Millet, en un geste de reconnaissance, donna le nom de 'Colonel  Candelot', lequel fut maire de Bourg La Reine, à l'une de ses variétés les plus réussies. La Maison Millet bénéficia elle-aussi de l'apport remarquables de I. mesopotamica et ne se priva pas d'utiliser cette espèce exceptionnelle pour ses meilleurs croisements, et en particulier pour 'Souvenir de Mme Gaudichau' (1914). Mais on lui doit aussi des variétés remarquables comme 'Corrida'(1914)', Romeo'(1922), 'Madame Cécile Bouscant' (1923), ou 'Souvenir de Laetitia Michaud' (1923), laquelle est à l'origine de deux vainqueurs de la Dykes Medal, 'Helen McGregor' (DM 1949) et 'Eleanor's Pride' (DM 1961).

Philippe de Vilmorin et la Maison Vilmorin-Andrieux. 

C'est évidemment le plus célèbre concurrent de Ferdinand Cayeux. Cependant jamais il ne réussit à lui ravir la Médaille Française de Dykes créée en 1928.

Pourtant des variétés comme 'Alcazar' (1910), 'Isoline' (1904), 'Oriflamme' (1904) ou 'Tamerlan' (1904) ont eu un succès commercial sans équivalent, à leur époque. Et tout au long des années 1920 et 1930 les iris Vilmorin ont fait jeu égal avec ceux de la famille Cayeux. 'Ambassadeur' (1920), 'Alliés' (1922), 'Le Poussin' (1926), 'Antarès' (1927), 'Alcée' (1930), 'Manoir de Launay' (1936) ou 'Audran' (1938) sont autant de succès admirés partout dans le monde, qui ont contribué à la fortune de la Maison Vilmorin-Andrieux. Malgré ces authentiques réussites, la célébrité de la famille Vilmorin n'a pas résisté à celle de la famille Cayeux...

L'ombre d'un géant est décidément bien épaisse et ceux qui s'y trouvent malheureusement dissimulés ne parviennent pas facilement à la transpercer et à s'épanouir à son côté.

Illustrations : 


'Alliés'


'Colonel Candelot' 


'Edouard Michel' 

'Madame Chobaut'

21.3.14

REINES DE LA NUIT

Elles n'apparaissent pas dans « La Flûte Enchantée » mais dans bon nombre de nos jardins. Elles ne chantent pas des airs périlleux de colorature, mais elles fleurissent chaque printemps, pour notre plus grand bonheur. Si elles sont noires, ce n'est pas la colère qui leur donne cette couleur mais les aléas de croisements savamment organisés. 

Elles, ce sont des variétés d'iris noires (ou presque). Elle vont nous accompagner pendant quelques semaines. 

1. NUITS PROVENÇALES 

La famille Anfosso a beaucoup travaillé sur les fleurs noires. Elle a longtemps été la seule dans notre pays à s'intéresser à ce coloris. Voici quatre de ses œuvres :


'Bar de nuit' (P. Anfosso, 1987) (Calamité X Superstition) 


'Calamité' (P. Anfosso, 1982) (Basic Black X Dusky Dancer) 


'Nuit de Chine' (P. Anfosso, 1993) (Bar de Nuit X Black Flag) 


'Nuit Fauve' (P. Anfosso, 1994) (Bar de Nuit X Black Flag)

UNE FAMILLE EN ORANGE

Gérard Madoré a pratiqué l’hybridation pendant plusieurs années, avant de renoncer et de se consacrer à une autre activité. Les fans d’iris regrettent cet abandon car, comme moi, ils appréciaient le joli travail de cet obtenteur. Parmi les croisements qu’il a réalisés, il en est un qui lui a donné vraiment satisfaction et dont il a conservé au moins dix frères de semis auxquels il a donné des noms de lieux bretons comme il a fait pour la plupart de ses obtentions. Ce croisement c’est (Good Show X Feu du Ciel). Dix frères de semis, vous allez dire que c’est un peu beaucoup, et c’est sans doute vrai, d’autant plus qu’il n’y a pas de fortes variations de l’un à l’autre. Néanmoins, si G. Madoré, dans un premier temps, n’a pas réussi à choisir, c’est qu’il était satisfait de toutes ces variétés. Nous allons vérifier cela et faire la connaissance de cette famille nombreuse, parents et enfants.

 ‘Good Show’ (Ben Hager, 1988) est un descendant direct de ‘Cinderella’s Coach’ (Hager 1986) et d’une kyrielle d’iris orangés ou rose pêche. Son pedigree se présente ainsi : (Cinderella's Coach X ((Hayride x ((((Norah x Thisbe) x Glittering Amber) x (semis x Glittering Amber)) x Picture Perfect)) x Fresno Calypso)). Pour ceux qui aiment les jeux de piste un peu compliqués, il y a de quoi s’amuser !

‘Cindirella’s Coach’ (Hager, 1986) = Punkin X (Hayride x ((((Norah x Thisbe) x Glittering Amber) x (semis T983 x Glittering Amber)) x Picture Perfect)) ; orange clair. 
‘Hayride’ (B. Jones, 1970) = Bright Butterfly X Spanish Gift ; deux tons d’orange. 
‘Norah’ (Lapham, 1951) = Bonny X Paradise Pink ; pêche, un peu rose.
‘Thisbe’ (M. Walker, 1933) = pedigree non précisé ; bleu clair. 
‘Glittering Amber’ (M. Hamblen, 1955) = Palomino X June Meredith sib ; abricot un peu ambré. 
‘Picture Perfect’ (M. Rogers, 1967) = September Song X Celestial Glory ; rose orangé très clair. 
‘Fresno Calypso’ (Weiler, 1978) = (Ballerina x Orange Crush) X semis Quadros (à partir de 'Golden Gene' et de semis oranges) ; orange vif, plus clair sous barbes.

 En le croisant avec ‘Feu du Ciel’ (R. Cayeux, 1993), lui-même orangé et provenant de parents oranges ((Skyfire x China Dragon) X Marcel Turbat), Madoré n’a fait qu’appliquer la vieille notion de l’endogamie pour rechercher un approfondissement de la couleur. Le résultat a, à l’évidence, comblé ses espérances !

‘Skyfire’ (Schreiner, 1980) = Flaming Day X ((semis x Pretty Carol) x Claudia Rene) ; orange vif. 
‘China Dragon’ (Shoop, 1979) = semis de Spanish Gift, Gay Time, Ole, Hamblen H5-35, Spanish Affair ; orange rosé.
‘Marcel Turbat’ (Cayeux J., 1993) = Piroska X (semis x Flaming Star) ; orange clair.

 On visite la Bretagne à la lecture des noms attribués aux cultivars issus de ce croisement :

‘Arzano’ (Madoré, 2007) – orange pur, un peu éclairci sous les barbes. 
‘Callac’ (Madoré, NR) – abricot. 
‘Corlay’ (Madoré, NR) – orange, un peu fumé. 
‘Crozon’ (Madoré, NR) – orange pur. 
‘Huelgoat’ (Madoré, NR) – orange pur. 
‘Languidic’ (Madoré, NR) – orange rosé. 
‘Plemet’ (Madoré, NR) – orange moyen. 
‘Plouaret’ (Madoré, NR) – abricot, un peu fumé. 
‘Plouescat’ (Madoré, NR) – orange clair. 
‘Plouhinec’ (Madoré, NR) – orange vif.

Un seul de ces iris a été enregistré. Aux yeux de son obtenteur ce devait être, en fin de compte, celui qui méritait le plus cette consécration. Cependant, si l’on se contente de ce que montrent les photos, on se dit que les autres n’étaient pas mal non plus.

 En matière d’iris oranges, Gérard Madoré a fourni un travail remarquable. Dans son joli moulin, au cœur de la Bretagne, modestement, il a indéniablement fait avancer la recherche dans ce coloris quelquefois difficile.

Illustrations : 

 ‘Good Show’ 


‘Feu du Ciel’ 


‘Arzano’ 


‘Languidic’

14.3.14

SEVENTIES

Les années 1970 ont été celles d’une certaine apogée dans l’hybridation des grands iris. Des obtenteurs d’une grande notoriété y ont atteint le sommet de leur art.
C'est aujourd'hui le dernier épisode de cette série.

 8. Walter Luihn

Walter Luihn ne fait pas partie des « gros » obtenteurs. La liste de ces obtentions n’est pas pléthorique, mais elle contient surtout des variétés de premier plan : presque toutes ont récolté au moins un HM et il est titulaire d’une Médaille de Dykes, ce qui n’est pas donné à tous ! Il fait partie de cette longue lignée d’obtenteurs californiens qui se sont illustrés au cours du XXe siècle et dont les variétés se retrouvent dans les jardins du monde entier.

Pour faire connaissance avec ce monsieur, voici quatre de ses meilleurs produits :


 ‘Modernaire’ (1974)

‘Pacific Peach’ (1979)

‘Song of Norway’ (1979)

‘Sunny Delight’ (1975)

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Question d'identité (encore ! ) 

 La même personne qui avait lancé sur “Iris Lovers” une âpre discussion à propos de la qualité d'hybrideur, a sollicité les opinions des participants au forum sur le fait de commercialiser, ou non, des semis non dénommés. Pour résumer un débat qui, cette fois, a conservé un ton mesuré, disons que la majorité des intervenants a rejeté l'idée de mettre au commerce des simples semis sans noms enregistrés, mettant en avant les risques de confusion et de trouble commercial.

 Cette condamnation quasi unanime fait d'autant plus regretter que certains pépiniéristes continuent de commercialiser des variétés non enregistrées.

A L'HORIZON

(Ceci est la traduction de la postface ajoutée par K. Keppel à son catalogue 2014, avec l'autorisation de l'auteur, et les photos fournies par lui)

 Mère Nature a été beaucoup plus gentille avec nous en 2013 que pendant les années antérieures. Ce n'est pas que le temps du printemps ait été une perfection, mais il a été néanmoins supérieur à celui de 2012, ce qui signifie que nous avons pu beaucoup mieux évaluer les nouveaux semis et les sélections précédentes. Les décisions définitives en vue des futures introductions ne se font seulement au printemps, mais il en est quelques-unes qui ont été prises en considération à ce moment...

 La plupart des semis issus du croisement 06-77 (Silk Road x Roaring Twenties) attire l'attention, en particulier 06-77C, avec la démarcation la plus nette entre les pétales jaunes et les sépales bleus. Son frère 06-77DD(1) est remarquable pour le contraste jaune/pourpre, et il possède aussi° d'excellentes tiges avec un grand nombre de boutons. 06-77D a des pétales jaune clair et des sépales couleur raisin avec une application irrégulière de la couleur ; 06-77F a les mêmes caractères, mais le bleu clair prend la place du jaune, et les sépales sont plus foncés et plus striés ou lavés. Nous continuons d'utiliser largement 06-77 pour nos hybridations.

Nous avons aussi utilisé abondamment 'Reckless Abandon', avec des résultats bons et intéressants. De ((Inside Track x Spice Lord) X Reckless Abandon) vient 09-88B, plicata chocolat/crème. Le variegata-plicata 09-88C a des pétales jaune éteint au-dessus de sépales plus crème avec un étroit liseré pourpre-rouge ; les autres caractères sont des tiges bien branchues et de nombreux boutons. Parmi les autres frères de semis on trouve des bitones violet foncé ou rouge pourpré avec des traces noirâtres sur le haut des sépales.

 Mais le croisement « Reckless » le plus étrange est (Reckless Abandon X (Reckless Abandon x frère de semis inversé de Ringtone)). Il est à peu près impossible de décrire 09-85C, avec des veines et des tons de gris, prune et pourpre-noir, des pétales ourlés de brunâtre, et des barbes orange soucis. Son frère 09-85E a des pétales bleu clair bordés d'ocre, des sépales de violet foncé à noir avec un cœur veiné de blanc et des barbes dorées. Plus bas (plutôt un BB) 09-85G est un plicata, pétales ivoire bordés d'ocre, sépales ivoire crémeux avec une étroite et nette bordure violet noirâtre, et des barbes orange brillant. On trouve d'autre couleurs ou modèles parmi les autres frères. Dire que c'est un croisement intéressant est un euphémisme !

'Friendly Advice' provient d'un autre croisement, intéressant et productif, et l'un de ses frères de semis, 06-156G, est un des enregistrements probables de 2015. C'est un rose, parfois un peu blanchâtre,avec des sépales lavés de lavande rosé, les barbes comportant du bleu, du rose crevette, du bleu lavande et du blanc. Le pollen d'un autre frère de 'Friendly Advice', déposé sur 'Silk Road', a donné 08-32A, crème et jaune pâle avec des barbes bleues devenant jaunes dans la gorge.

Un de nos préférés de ces dernières années a été 09-104A, un iris trapu issu de ((Oreo x Hello Darkness) X semis plicata de Tangled Web). C'est un noir brillant, élégamment ondulé, avec le haut des sépales uni et qui dissimule ses origines au trois-quarts plicata.

Il y a en observation plusieurs combinaisons de plicatas contrastés en jaune et rouge, principalement issues de 'Drama Queen', 'Tuscan Summer', 'Sorbonne' ou 'Class Ring'. On trouve les meilleurs coloris ou modèles à base de pétales à fond blanc et de sépales à fond jaune chez des fleurs issues de pedigrees beaucoup plus complexes, mais qui comportent aussi beaucoup de défauts. Nous travaillons toujours sur ce projet !

 Les luminatas continuent à poser problème. Plein de modèles, plein de couleurs... mais aussi plein de plantes trop basses, d'une façon générale. Nous avons fait des croisements hors ligne pour apporter du sang neuf, et les nouveaux semis fleurissant en 2013, impliquant 'Arrivederci' ou 'Wishes Granted', ont l'air d'être beaucoup plus prometteurs pour la génération suivante.

 La génération 2013 a donné quelques grands roses ('Strawebrry Shake', en association avec un semis de 'Guardian Angel' et un de ses frères de semis) ; de superbes formes ('Arrivederci', 'Wishes Granted', 'Dancing Days ont donné les meilleurs résultats). Nous n'avons pas beaucoup travaillé sur les médians. Soft Word X Boston Cream a donné une foule de blancs et de crème, certains avec les épaules colorées et des barbes rouges, et certains avec d'excellentes tiges et une taille appropriée pour des intermédiaires ou des iris de bordure... mais y en aura-t-il un suffisamment original pour sortir du lot ? La lignée des nains à barbes bleues continue, surtout par l'utilisation de 'Satin Accent' et de 'Decorum'. Quelques mignons neveux et nièces de 'Miniseries', surtout dans les tons d'abricot. Mais c'est dur de trouver encore l'énergie de se battre dans la catégorie des nains quand il y a une telle pléthore de superbes médians en provenance de chez Black et Johnson à seulement quelques kilomètres d'ici ! Au demeurant je dois avouer une beaucoup plus sérieuse attirance pour les grands barbus...

 (1) Keith Keppel ajoute le commentaire suivant : « 06-77DD : Celui-ci est intéressant en ce qu'il commence avec des sépales de couleur plutôt unie ; avec l'âge la couleur pâlit, en commençant par le bord et en gagnant progressivement le centre. » 

 Illustrations : 

06-77D 

06-77DD 


09-85C 


09-88C

7.3.14

SEVENTIES

Les années 1970 ont été celles d’une certaine apogée dans l’hybridation des grands iris. Des obtenteurs d’une grande notoriété y ont atteint le sommet de leur art.

7. Sanford Babson

 Si l’on devait décerner une médaille à l’obtenteur le plus discret, sans doute devrait-on décorer Sanford Babson. Ce Californien du Sud a fourni au monde des iris des variétés qui ont marqué leur temps, sans qu’il recherche la moindre notoriété. Il ne songeait ni aux honneurs ni à la célébrité, car il considérait les iris comme un loisir, son activité principale étant la culture des orangers. Il prétendait ne pas avoir d’idée préconçue dans ses choix de croisement, mais à défaut de ligne de conduite claire, il avait au moins un sens précis de ce qui pouvait aboutir à quelque chose de neuf et d’intéressant. C’est sans doute pourquoi la plupart de ses variétés ont eu une descendance nombreuse et valeureuse, ce qui prouve l’excellence de ses choix.

Voici quatre de ses choix :


 ‘Chapeau’ (1971)


 ‘Far Galaxies’ (1977)


 ‘Odissey’ (1971)


 ‘Pantomime’ (1970)

LA FLEUR DU MOIS

‘CATALYST’

 Encore une variété qui n’a fait, dans mon jardin, qu’un bref passage, et que je regrette d’avoir perdue. Je l’ai achetée en 1989, je crois, chez Iris en Provence. 1989 a été une année difficile pour ma collection d’iris. C’est cette année-là qu’elle a quitté la rive gauche de la Vienne pour une transplantation sur la rive droite. Ce n’est pas la distance qui a posé problème, mais la préparation du terrain. Je n’ai pas eu la possibilité d’effectuer un bêchage profond, dans une terre qui n’était plus cultivée depuis plusieurs années. De plus l’été a été sec et chaud, comme souvent en Touraine, et le sol, argilo-calcaire, était terriblement dur ! Non content de transplanter tout le monde, j’ai ajouté un certain nombre de variétés nouvelles, parce que j’avais plus de place qu’auparavant et que cela faisait plusieurs années que je refreinais mes envies d’extension. Dans ces conditions le pauvre ‘Catalyst’ n’a sans doute pas eu les soins qu’il méritait. Il a poussé, cependant, et fleuri l’année suivante. C’est alors que je me suis aperçu que j’avais toute une bordure plantée beaucoup trop à l’ombre d’une grosse haie. De fait, les années qui ont suivi, les iris de cette plate-bande ont donné tous les signes d’un manque d’ensoleillement. ‘Catalyst’ a été particulièrement réticent à fleurir dans son coin ombreux et frais : je ne l’ai vu que deux autres fois, avant que je ne procède à un remaniement de toute la plantation. C’est cette nouvelle transplantation qui lui a été fatale…

C’est une variété sans doute un peu fragile, comme quelquefois les iris de Keith Keppel. ‘Catalyst’ (Keppel, 1979) était pourtant utile dans ma collection où je manque de beaux jaunes, clairs et francs. Il est décrit comme étant d’un jaune tournesol, plus doré à la base des pétales et plus sombre aux sépales. Comme assez souvent chez son obtenteur, il possède un pedigree plutôt compliqué : Generosity X 72-5B: ((((Frances Kent x Mary Randall) x (60-183-Q: Sexton 60 x Golden Gene)) x (Denver Mint x 60-183-O)) x (Radiant Light x (((Golden Gleam x Hallmark) x (Sexton 60: Gail x Techny Chimes)) x 60-183A))). Dans cet amas de lettres et de chiffres, il faut comprendre que le croisement n° 60-183 est mis plusieurs fois à contribution. Il est lui-même constitué de (Gail x Techny Chimes) X Golden Gene. La majorité de ses composants compte certains de ce qui se faisait de mieux en matière d’iris jaunes à cette époque :

‘Generosity’ (Keppel, 1978), jaune crème ;
‘Frances Kent’ (deForest, 1948), mêlé de jaune et de crème ;
‘Denver Mint’ (Knopf, 1962), jaune pur ;
‘Golden Gleam’ (Miess, 1950), jaune vif ;
‘Techny Chimes’ (Ch. Reckamp, 1955), jaune soutenu
‘Golden Gene’ (Quadros, 1961), jaune orangé.

Ajoutez-y une dose d’orange, pour foncer le mélange :

‘Radiant Light’ (Fay, 1963), vraiment orange ;
‘Hallmark’ (Hall, 1955), rose flamant, orangé ;
‘Gail’ (S. Jensen, 1955), orange profond.

Et un peu de rose :

‘Mary Randall’ (Fay, 1950), un des premiers vraiment roses.

Rien de révolutionnaire dans le procédé d’amélioration de la couleur, mais une manière d’ « inbreeding » traditionnelle, qui a donné un résultat à la mesure des espérances mises dans les croisements.

Encore aujourd’hui ‘Catalyst’ est digne de figurer dans les meilleures collections, et j’aurais bien aimé qu’il fut encore dans la mienne.

Illustrations : 


‘Catalyst' 



‘Generosity’ 


‘Techny Chimes’ 


‘Mary Randall’

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Un diplôme d'hybrideur ? 

 Sur le forum “Iris Lovers”, une vive discussion, qui a malheureusement sombré dans l'invective et la confusion, a eu lieu sur le sujet suivant : “Qu'est-ce qu'un hybrideur ?” La personne qui a lancé ce débat soutenait que ce qualificatif ne convenait pas à ceux qui se contentent de croiser deux variétés d'iris (puis font enregistrer leurs obtentions), mais qu'il devrait être réservé à ceux dont l'hybridation est le métier. Certains ont abondé en ce sens, d'autres on considéré au contraire qu'on est hybrideur dès lors qu'on pratique l'hybridation.

 Pour distinguer entre hybrideurs professionnels et hybrideurs amateurs, il faudrait une sorte de certificat d'aptitude professionnel dont on ne voit pas qui pourrait le délivrer et avec quelle légitimité dans un monde ouvert et libre. Il est préférable de laisser à chacun la responsabilité de ses actes. Il y aura toujours des hybrideurs amateurs, qui pratiqueront pour leur plaisir et enregistreront parce qu'ils considèreront leur travail comme suffisamment achevé. Et il y aura des “pros”, dont les obtentions seront commercialisées et appréciées partout dans le monde. Mais gardons-nous de tout distinguo arbitraire.

DE LA DOUCEUR AVANT TOUTE CHOSE

Ce titre, qui parodie Verlaine, est là pour aborder la description de certains iris obtenus par le Canadien Thomas Johnson, l’allié de Paul Black à MID-AMERICA Garden. Cet hybrideur, l’un des plus doués de sa génération, propose chaque année une poignée de variétés nouvelles toutes plus belles les unes que les autres. Il a déjà à son actif plusieurs récompenses internationales, notamment le Florin d’Or obtenu en 2008 par ‘Morning Sunrise’ (2005), et surtout la Médaille de Dykes décernée en 2010 à son ‘Paul Black’ (2002), l’une des variétés les plus utilisées en hybridation à travers le monde.

 Depuis quelques années il recherche ce qu’il y a de plus doux dans le genre d’iris pastels. Que ce soit dans les tons de bleu, comme ‘Spirit in the Sky’ (2007) ou ‘Ice Capades’ (2008), ou dans ceux qui nous intéressent aujourd’hui, les roses.

 L’opération a commencé en 2007 avec ‘Heart of Glass’, issu de (Social Graces X Frosting). Elle s’est poursuivie avec ‘Stilettos’ (2009), produit de (Ballet Royale X Corps de Ballet), et surtout avec ‘Secret Affair’ (2010) qui vient de (Pink Invasion X Waterfall Mist). En jouant avec les mots on pourrait dire que, pour être secrète, cette affaire a été fructueuse. Car il en est résulté deux chefs d’œuvre de douceur, ‘Flamingo Frenzy’ (2012) et ‘Fine Romance’ (2013), fruit du croisement (In Love Again X Secret Affair). De plus en associant (Ballet Royale x Corps de Ballet) et ‘Secret Affair’ Tom Johnson a obtenu ‘Don’t Stop Believing’ (2013) qui donne dans le même registre.

‘Flamingo Frenzy’ est d’un rose dragée très doux, avec une barbe un peu plus vive et bleutée ; ‘Fine Romance’ est dans l’ensemble plus bleuté avec une barbe assortie ; ‘Don’t Stop Believing’ ressemble beaucoup au précédent, mais les pétales sont un peu plus frou-froutants et la barbe plus bleue. Avec leurs teintes apaisantes, ces trois fleurs atteignent une sorte de perfection dans la douceur. On ne sait évidemment rien du semis (Ballet Royale x Corps de Ballet) utilisé dans ce cas, sinon qu’il s’agit d’un frère de semis de ‘Stilletos’, mais tout laisse à penser qu’il ne diffère pas beaucoup de son descendant. En tout cas il lui apporte sûrement le bleu des barbes de son composant ‘Corps de Ballet’ (Hager, 1995) et le rose tendre de ‘Ballet Royale’, comme c’est le cas pour ‘Stilletos’.

 Le premier de la série, ‘Heart of Glass’ possède déjà tous les caractères recherché : douceur d’un rose pastel, douceur d’une barbe presque blanche, gracieuses frisettes sur les pétales, amples ondulations des sépales. Une fleur délicieuse. Ces caractères se trouvaient déjà dans les parents dont l’union n’a fait qu’apporter le tonus, plus évident de ‘Social Graces’ au ton pastel de ‘Frosting’.

Pour obtenir ‘Secret Affair’ il a fallu associer le rose tendre très frisé ‘Pink Invasion’ (2010) et le bleu tendre ‘Waterfall Mist’ ( Black P., 2006). Le résultat est effectivement un assemblage des couleurs des deux parents.

 Dans tout ceci on n’est pas dans une cuisine compliquée, mais dans la continuation – et sans doute l’aboutissement – d’un travail classique où sont réunies les qualités de chacun de parents. Pour ceux qui veulent aller dans le même sens, il y a là des leçons à retenir.

 Voici les pedigrees des variétés dont il vient d’être question :

‘Ballet Royale’ (V. Wood, 1999) = Bubble Up X (((Mais Oui x Carved Pink) x Blushing Pink) x (Pink Belle x ((Pink Attire x Pink Persian) x ((Princess x Pink Taffeta) x Carved Pink))))

 ‘Corps de Ballet’ (B. Hager, 1995) = (Terra Bella sib x (Come to Me sib x (Birthstone x Sky Hooks))) X (((((Carved Cameo x Picture Pink) x (Orchid Song x Vanity)) x Magic) x ((Orchid Song x Vanity) x (Ice Sculpture x (Pink Taffeta x (One Desire x Adorable You))))) x Enchanting)

 ‘Femme Fatale’ (J. Gatty, 1988) = Paradise X Pretty Lady ‘Frosting’ (Gatty, 1992) = (Pretty Lady x (Nefertiti x Playgirl)) X Presence

‘In Love Again’ (K. Keppel, 2004) = Lotus Land X (Frosting x(Social Event x Femme Fatale))

‘Lotus Land’ (K. Keppel, 1999) = (Social Event x Femme Fatale) X (Social Event x Bubble Up)

‘Pink Invasion’ (Johnson T., 2010) = Keeping up Appearances X Lotus Land

 ‘Social Event’ (K. Keppel, 1991) = (Maraschino sib x Thelma Rudolph) X Satin Siren sib

‘Social Graces’ (Keppel, 2000) = (Femme Fatale x ((Nefertiti x Playgirl) x Presence)) X Social Event

‘Waterfall Mist’ (P. Black, 2006) = Leta Black X Fogbound

 Illustrations : 

‘Heart of Glass’ 


 ‘Flamingo Frenzy’ 


 ‘Fine Romance’ 


‘Don’t Stop Believing’ 


 ‘Secret Affair’