25.1.13

PEINDRE LES IRIS

Pour peindre des iris il n’est pas nécessaire de s’appeler Claude Monet. De nombreux artistes ont associé leur nom à la peinture florale en général et à celle des iris en particulier. Pendant les années où je me suis occupé de la Revue « Iris & Bulbeuses » j’ai fait appel à plusieurs reprises, pour l’image de couverture, à des illustrateurs contemporains souvent renommés. A deux reprises ce fut l’illustratrice polonaise Barbara Smocszenska, spécialiste de l’aquarelle, qui est aussi mon amie. Sa peinture est une œuvre d’artiste, où la réalité passe par le prisme de la sensibilité et de l’émotion. Ce n’est pas de la peinture naturaliste. Cette dernière tend à représenter au plus près la réalité. Elle fixe d’une façon définitive ce qu’est le sujet, débarrassé de tout son environnement, lequel détourne obligatoirement le spectateur de ce qui en fait l’essence. Cette forme de peinture n’implique pas une représentation chirurgicale, dépourvue de poésie ; au contraire elle saisit tout ce que le sujet a d’intéressant, y compris ce qui provoque l’émotion du spectateur, mais ne néglige pas le côté scientifique de l’affaire. A l’image de ce que faisait le célèbre peintre wallon Pierre-Joseph Redouté au début du 19e siècle, elle reproduit le sujet par le trait et par la couleur, dans ses moindres détails. En ce sens l’aquarelle est certainement plus précise, plus intransigeante que ne peut l’être la peinture à l’huile. C’est sans doute pour cela qu’elle est le moyen utilisé par le peintre naturaliste, et c’est essentiellement elle qu’emploient les artistes dont il va être question maintenant. 



Pour commencer parlons de Christiane Mathieu, une artiste auvergnate qui expose partout à travers le monde. Ses huiles sur toile comme ses aquarelles dénotent un goût très sûr et un art consommé du détail. C’est elle qui a réalisé l’affiche du premier concours d’iris français, FRANCIRIS 2000. Depuis 1992 elle est membre de la SNHF, et depuis 2005 elle organise des stages d’aquarelle botanique en petits groupes. L’iris bordeaux qui illustre cet article allie exactement la délicatesse du dessin et une représentation sensible de la réalité.

 Jeannine Néri est une autre grande artiste qui vit, elle, dans les Alpes de Haute Provence. Elle pratique aussi bien la peinture à l’huile que l’aquarelle qu’elle a découverte en 1988 et qui fut pour elle une véritable révélation. Dans sa biographie il est écrit : « La finesse du trait, la délicatesse de la touche, la précision du détail et un sens inné de l’éclairage confèrent à ses aquarelles une rare séduction. » Les lecteurs de ce blog en auront une idée grâce à l’illustration qui figure ci-dessus, une aquarelle où, pour une fois, l’inspiration artistique supplante la représentation stricte du sujet.

Artiste naturaliste périgourdine, aquarelliste, Jacqueline Candiard est Maître de dessin du Muséum d’Histoire Naturelle de Paris. Le dessin botanique est son affaire. Elle a peint la collection d’iris du Parc Floral de Paris. La finesse de son trait et l’acuité de son coup d’œil font merveille pour la reproduction fidèle des fleurs. Témoin, le dessin de ‘Touch of Sky’ reproduit ci-dessus où une extrême économie de moyens saisit à la fois la grâce et la délicatesse de la fleur et la finesse des détails.

Annie Hovanessian est une autre aquarelliste qui s’intéresse essentiellement à la représentation des végétaux qu’elle peint d’après nature, par le procédé de l’aquarelle sèche, c’est à dire que l’œuvre est entièrement réalisée au pinceau « pour qu’aucun trait de crayon ne vienne l’alourdir ». Comme l’artiste le dit elle-même : « L’aquarelle “sèche”, par sa finesse permet de vivre à l’infini les mystères de la couleur, de la transparence et de la lumière. » Cela donne des peintures délicates, où la plante apparaît dans toute sa pureté. Annie Hovanessian n’est pas une spécialiste de l’iris, mais la reproduction ci-dessus d’un petit SDB, ‘Sea Monster’ (Lynda Miller, 1992), est démonstrative de son talent. Elle vient de publier un petit recueil de certaines de ses œuvres sou le nom de « Le jardin d’une Aquarelliste ».

 Les amateurs d’iris connaissent Colette Thurillet au moins par le grand iris que Richard Cayeux lui a dédié. ‘Colette Thurillet’ (1989) a été peint par l’artiste et figure dans le petit recueil de ses œuvres qu’elle a publié sous le titre « A l’entour de l’iris ». Dans la biographie présentée sur son site on peut lire : « Ses sujets de prédilection : Les fleurs, les fruits, les oiseaux, les insectes, les poissons, les coquillages, les animaux : le cheval et autres animaux de la ferme, les chiens et les chats... (…) Avec un sens inné de la botanique et la passion des animaux, elle met toute sa sensibilité pour reproduire fidèlement la couleur et pour adoucir la rigueur scientifique du dessin. Dans ses œuvres, l’image et le modèle se confondent. » On ne peut mieux décrire l’art du peintre naturaliste.

 Jacqueline Farvacques est peut-être la plus connue des illustratrices de l’iris. Ne serais-ce que par sa collaboration aux ouvrages produits par Richard Cayeux. « Formée aux Beaux-Arts, à l'Ecole nationale supérieure des arts décoratifs, à l'Ecole du Louvre. Membre de la Société nationale d'horticulture française et de la Société des peintres Botanistes anglais, elle a été distinguée (médaille) par la Royal Horticultural Society de Londres. » Le petit opuscule « Iris » qu’elle a publié en 1999, avec les textes de la journaliste Marie-Françoise Valéry, est un concentré de ce qui se fait de mieux tant au point de vue botanique ou horticole que pour la qualité des illustrations. L'image ci-dessus, tirée de « L’iris, une fleur royale » est particulièrement réussie.

Les aquarellistes de talent sont fort nombreux, ceux qui se consacrent aux végétaux, un peu moins, et les spécialistes de l’iris, plutôt rares. Ceux (celles) qui sont évoqués dans cette chronique sont les piliers français actuels de ce petit monde.

 Illustrations :
- Christiane Mathieu : Iris bordeaux ; 
- Jeannine Néri : Iris ; 
- Jacqueline Candiard : ‘Touch of Sky’ ; 
- Annie Hovanessian : ‘Sea Monster’ ; 
- Colette Thurillet : ‘Song of Norway’ ; 
- Jacqueline Farvaques : ‘Coquetterie’.

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