8.6.12

JAUNE DE FRANCE


Ce n’est qu’au cours des années 1930 qu’on a obtenu les premiers iris vraiment jaunes. C’est dire combien l’obtention de cette couleur a été laborieuse. D’abord on a essayé de l’obtenir en partant de I. variegata, cette espèce dont les pétales sont effectivement jaunes mais dont les sépales portent de fortes veines brun-violacé. Le travail a donc consisté à éliminer ces veines. Longtemps les obtentions qualifiées de jaunes, comme le célèbre ‘W. R. Dykes’ (Dykes – Orpington, 1926) ont comporté des marques violettes ou brunes assez disgracieuses. Le Professeur Mitchell a imaginé d’obtenir du jaune par un autre chemin. Il a tenté d’améliorer la pureté de cette couleur et alliant une variété d’un ton de bronze et une variété blanche ou vice-versa. Il a essayé et après une grande quantité de semis plus ou moins intéressants il a obtenu ce qu’il cherchait : du jaune vraiment jaune. C’est le cas de ‘California Gold’ (1933) et surtout de ‘Happy Days’ (1938), qui est considéré comme l’aboutissement d’un long voyage. A partir de là, la ligne jaune était tracée. Plus tard, pour améliorer encore l’éclat du jaune, les hybrideurs ont eu l’idée d’ajouter au cocktail une pointe d’orange qui a eu pour résultat de colorer plus vivement les barbes et donc de mettre mieux en valeur le jaune de la fleur. Les jaunes des années 50 ont pris en compte cette avancée. Cependant un autre événement a marqué les années 50 : l’apparition de jaunes à l’occasion de croisements destinés à obtenir des iris roses. Par-dessus le marché, ces iris jaunes-là se sont révélés beaucoup plus brillants et frisés que les jaunes traditionnels.

Avec tout ce matériel on est parvenu, dans les années 1960 à obtenir des jaunes parfaits. Mais il a fallu trente ans pour atteindre ce résultat !

Aujourd’hui, chaque année, des dizaines de bons iris jaunes sont mis sur le marché. Quand on dit « jaune », on comprend tout ce qui va d’un jaune crème ou ivoire, au sombre jaune safran, ou vieil or, en passant du jaune primevère au jaune citron puis au jaune d’or. La palette est immense. A la couleur s’ajoute l’ornementation de la fleur. Les iris jaunes ne sont pas réputés pour l’importance de leurs ondulations et la finesse du lacinié de leurs pétales. Cependant les jaunes modernes possèdent souvent ces ornements. Voyons ce que cela donne, chez quelques-uns de ceux qui sont apparus depuis le début du XXIeme siècle, en France seulement, pour corser la sélection.

Notre Richard Cayeux national n’a pas négligé la couleur jaune. Par deux fois, ces dernières années, il nous a proposé de belles nouveautés, franchement jaunes : ‘Grand Canari’ (2006), agrémenté d’éperons qu’il tient de son grand-parent ‘Conjuration’, et ‘Pot d’Or’ (2009) tout à fait classique, mais dont on ne connaît pas les parents.

J’aime bien le ‘Carte d’Or’ (2003) de Lawrence Ransom. Issue de (Opéra Bouffe X Speculator), c’est une fleur élégante, impeccablement coiffée, dans un coloris qui, pour ne pas être uniforme, n’en est pas moins somptueux.

Bernard Laporte s’est aussi essayé au jaune. Son ‘Soleillade’ (2006), en jaune tendre, rejoint une série de jaunes plus ou moins purs qui vont de ‘Féria de Nîmes’ (2006) veiné de brun sous les barbes, à ‘Messire Lancelot’ (2004), dégradé du jaune crème au jaune primevère.

Quelqu’un qui s’est beaucoup investi dans les iris jaunes, c’est Gérard Madoré. Le Breton en a produit plusieurs, qui vont du jaune d’aspect traditionnel au jaune ondulé moderne. Les plus remarquables se nomment ‘Plogoff’ (2001) et ‘Laniscat’ dans le genre classique, ‘Mimosa en Mai’ (2005), classique également, mais sans doute plus raffiné, de même que ‘Langolen’ (2001), mon préféré ; ajoutons ‘Guénolé’, ‘Plancoët’ et ‘Plouay’ qui sont les frères de semis des précédents ; enfin ‘Trémargat’ (2005) joliment ondulé, provient de la même souche, à la génération suivante. Le croisement qui est à l’origine de cette nombreuse famille est (Pirate’s Quest X Good Show) : le jaune pur de ‘Pirate’s Quest’ y est avivé par l’excellent orange de ‘Good Show’.

Pour terminer ce tour d’horizon, disons un mot de celui qui me semble aujourd’hui le plus prometteur. Il s’agit d’Alain Chapelle. Ce nouveau venu dans le monde de l’hybridation a sélectionné en 2011 deux superbes fleurs, toutes deux ayant pour parent féminin ‘Pirate’s Quest’, comme chez Madoré : ‘D’Or et de Lumière’ (2011) (Pirate’s Quest X Picasso Moon), éclatant, et ‘Soleil d’Or’ (2011) (Pirate's Quest x Pure as Gold), plus sombre.

Une nouvelle fois on constate que les obtenteurs français tiennent aujourd’hui la dragée haute à leurs concurrents américains. Il faudrait qu’ils soient mieux commercialisés pour prouver leur aptitude à l’ensemble du monde des iris.

Iconographie


‘Grand Canari’ (Cayeux 2006) ((Chevalier de Malte x Conjuration) X (Parisien x(Beach Girl x Joli Coeur)))
‘Pot d’Or’ (Cayeux, 2009) (parents inconnus)
‘Langolen’ (Madoré, 2001) (Pirate’s Quest X Good Show)
‘D’Or et de Lumière’ (Chapelle, 2011) (Pirate’s Quest X Picasso Moon)

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