29.1.10


ECHOS DU MONDE DES IRIS

L’American Iris Society en deuil

Le Président en exercice de l’AIS, E. Roy Epperson, est décédé brusquement le week-end dernier. Ce personnage d’aspect sévère, mais doué d’un humour fin et agréable, était venu en France en 2005 pour présider le jury du concours FRANCIRIS 2005. Ceux qui l’ont connu à cette occasion ont pu apprécier son sens du consensus et son autorité naturelle. C’est un grand ami des iris que le microcosme irisarien vient de perdre.










LA COLLECTION DES MÉDAILLÉS

1977


DM : ‘Dream Lover’ (Esther Tams, 71) (Miss Indiana X ( Melodrama xRippling Waters); le triomphe d’un outsider, comme il arrive parfois dans les grandes compétitions.

Wister Medal : ‘Queen of Hearts’ (Opal Brown, 74) ((Grandiflora x Christmas Time) X Buffy); une variété dont on entendra encore parler! !

President’s Cup : ‘Bride’s Halo’ (H. Mohr, 73) (Rainbow Gold X Denver Mint); nouvelle citation pour ce superbe iris.

Franklin-Cook Cup : ‘Sun King’ (Stahly, 77) (Lilac Mist X Meghan); une variété qui est toujours d’actualité.

Walther Cup : ‘Bicentennial’ (Ghio,76) (Peace Offering sib X Ponderosa); un des nombreux descendants des ‘Ponderosa’.

FO : ‘Chamber Music’ (Williamson, 73) (Western Welcome X One Desire); un coloris que l’on rencontre souvent : une plante qui a eu de la chance.

BDM : ‘Annabel Jane’ (Dodsworth, 74) (Sterling Silver X Chamber Music); le premier succès de Brian Dodsworth, un anglais qui en a remporté de nombreux.










LE NOIR LEUR VA SI BIEN

Nous allons parler cette fois des iris noirs. J’ai déjà fait un tour de cette question dans un article publié en octobre 1999 dans le bulletin de l’AIS. Il s’agit maintenant de rafraîchir ce texte déjà vieux de dix ans.

La couleur noire s’obtient en mélangeant à parts égales le jaune, le rouge et le bleu. Quand ces trois couleurs primaires se rencontrent parmi les gènes d’une plante, on peut espérer obtenir du noir. Mais si l’une de ces couleurs vient à manquer, on ne peut que s’approcher du noir, au moyen de divers artifices. C’est ce qui se produit avec les iris où la couleur rouge est absente. Il faut donc se débrouiller avec ce qu’on a pour essayer de faire du noir : c’est un défi pour les hybrideurs. Ils vont jouer avec le jaune, le bleu et le magenta qui sont à leur disposition.

Si on commence par le jaune, on peut s’approcher du noir en saturant de proche en proche le brun. On doit pouvoir obtenir un brun très sombre, comme on qualifie de « noir » un café très fort. Jusqu’à présent c’est la voie la moins recherchée, sans doute parce que c’est la plus difficile.

Avec le bleu, on passe à l’indigo puis au violet, et, de là, il est assez facile de tendre vers le noir.

C’est peut-être surprenant, mais on peut aussi s’approcher du noir en partant du magenta. Via le grenat, le pourpre, on peut obtenir un rouge très foncé proche du noir.

Cela fait 80 ans que les hybrideurs se démènent. Ils sont maintenant arrivés au but. On peut désormais faire le point. A quoi ressemblaient les premiers iris dits noirs ? Comment les choses ont-elles évolué ? Où en est-on aujourd’hui ?

Au début, il y avait les frères Sass, dans le Nebraska, Paul Cook dans l’Indiana et les Schreiner dans l’Oregon. Chacun suivait son propre chemin. Les Sass ont sélectionné les plus sombres de leurs semis issus de leur ligne de bleu et de violet et les ont croisés entre eux. Le résultat a été l’introduction de ‘The Black Douglas’ en 1934. Pour Paul Cook, la voie a été celle de Iris aphylla (petit iris bleu très foncé), qu’il utilisait aussi à d’autres fins dans ses programmes, et il a introduit en 1938 le fameux ‘Sable’, qui fut considéré comme le meilleur noir de son époque, et dont le descendant ‘Sable Night’ (50), encore plus sombre, a obtenu la Médaille de Dykes en 1955. Au moment où ‘Sable’ était mis sur le marché, la maison Schreiner obtenait ‘Ethiop Queen’ (1938), descendant de ‘The Black Douglas’ et d’un semis brun-rouge sombre. Les Schreiner ont continué sur leur lancée et utilisé à leur tour les propriétés d’Iris aphylla et obtenu ‘Black Forest’ (45), qui est devenu la base des noirs modernes.

Les années 70 ont vu apparaître des quantités de fleurs noires de qualité. Celles de Gordon Plough sont remarquables : ‘Swahili’ (65), ‘Study in Black’ (68), puis ‘Black Market’ (73) et ‘Interpol’ (73). On trouve aussi ‘Dusky Dancer’ (Luihn 67), ‘Basic Black’ (Hager 71), ‘Opening Night’ (Gibson 70) et plusieurs « made in Schreiner » comme ‘By Night’ (76), ‘Superstition’ (77), ‘Swazi Princess’ (78)…

Au cours des années 80 la profondeur du noir s’est accrue, accompagnée d’un aspect velouté des tépales qui ajoute à la perfection. Témoins, chez Schreiner, ‘Black Dragon’ (82), ‘Back in Black’ (86), ‘Midnight Express’ (88), chez Maryott ‘Witches’ Sabbath’ (86), chez Stahly ‘Black Flag’ (88), chez Luihn ‘ Blackout’ (88), chez Innerst ‘Before the Storm’ (89)… En France, il n’y a que la famille Anfosso qui se soit intéressée aux iris noirs. Elle nous a donné ‘Calamité’ (82), ‘Bar de Nuit’ (87), ‘Draco’ (88), puis encore ‘Nuit de Chine’ (93) et ‘Nuit Fauve’ (94), son travail s’est alors brusquement arrêté, en ce domaine comme en tout autre d’ailleurs.

Les Schreiner, en revanche, ont maintenu le cap et chaque catalogue a présenté quelque nouveau noir : ‘Night Ruler’ (90), ‘Midnight Dancer’ (91), ‘Hello Darkness’ (92), ‘Black Tie Affair’ (93), ‘Paint it Black’ (94), ‘Old Black Magic’ (96)…

Que peut-on encore espérer en matière d’iris noir ? Il semble bien que le plus gros ait été fait. D’ailleurs les variétés noires qui apparaissent encore n’apportent pas vraiment un gain de saturation mais plutôt des améliorations formelles comme les ondulations des pétales ou le nombre de boutons floraux. Tout le travail des hybrideurs tourne autour de cela ; à partir des variétés noires antérieures. Tous les iris noirs ont au moins pour parent l’une des variétés citées ci-dessus. ‘Night Ruler’ apparaît derrière ‘Midnight Vigil’ (Stahly 2005) et ‘Armorique’ (Madoré 2005) ; ‘Hello Darkness’ est la base la plus utilisée, comme pour ‘Black Phantom’ (Maryott 2001), ‘Dangerous Mood’ (Schreiner 2004), ‘Fade to Black’ (Schreiner 2002), ‘Lord of the Night’ (Sutton G. 2005), ‘Pen Hir’ (Madoré 2001) ou ‘Warranty’ (Johnson T. 2003) ; ‘Black Tie Affair’ est un des parents de ‘Tahitian Pearl’ (Johnson L. 2003) ; ‘Paint it Black’ figure dans le pedigree de ‘Twilight Tear’ (Filardi 2006) ; quant à ‘Old Black Magic’, c’est la « mère » de ‘O’ So Very’ (Brown D. 2005). Et il ne faut pas oublier ceux qui ont utilisé les noirs de la génération précédente, comme Sterling Innerst pour ‘Anvil of Darkness’ (98) ou Sergeï Loktev pour ‘Chiornaya Vdova, « la veuve noire » (2006), qui ont fait usage de ‘Before the Storm’ ; de même Hedgecock s’est servi de ‘Swazi Princess’ pour ‘Cowboy in Black’ (2004) et ‘Dark Past’ (98).

Les iris noirs maintenant jouent sur un autre registre, celui des barbes jaunes ou rouges et celui des bicolores (blanc/ noir ou bleu/noir). ‘Tom Johnson’ (Black 96) mise sur la barbe rouge, ‘Mystérieux’ (Cayeux 2003) joue sur les deux tableaux avec un bleu profond au-dessus d’un noir bien sombre, et des barbes bronze. C’est donc plutôt de ce côté que viendront les nouveautés. Mais il n’y a pas lieu de s’arrêter de faire porter du noir aux grands iris car cette couleur leur va si bien !

22.1.10


LES PLUS BELLES PHOTOS D’IRIS

On avait un peu oublié cette rubrique ! Pour cette fois, c’est une nouvelle et remarquable photo de celle dont le pseudo est « greenorchid » : une grande dame de la photographie.










LA COLLECTION DES MÉDAILLÉS

1976


DM : ‘Kilt Lilt’ (Gibson, 70) (semis X Golden Filigree), un des variegata-plicata les plus brillants, toujourd intéressant au jardin.

Wister Medal : ‘Bride’s Halo’ (H. Mohr 73) (Rainbow Gold X Denver Mint), un futur vainqueur de la DM.

President’s Cup : ‘Queen of Florence’ (Mallory, 76) ((Melodrama x Lynn Hall)x Arctic Flame),couronné à Florence en 75 ; bien oublié depuis.

Franklin-Cook Cup : ‘Blushing Lemon’ (Boushay, 73) (Kingdom x Ultrapoise), jaune, infus de rose orchidée ; resté totalement inconnu.

Walther Cup : ‘Caramba’ (Keppel, 75) ((Wild Ginger x Siva-Siva) X (((Gene Wild x Majorette) x Rococo) x Ballyhoo sib.)) ; c’est l’année des variegata-plicata ! Une variété des plus appréciées à travers le monde.

FO : ‘Dialogue’ (Ghio, 73) (Veneration X ((((Frosted Starlight x (Spanish Peaks x Black Satin)) x ((Cahokia x Pierre Menard) x (Black Forest x Chivalry))) x Penthouse) x (Mahalo x Diplomacy))) ; c’est l’inverse de ‘Mystique’ : très apprécié.

BDM : ‘No Name’ CA (M. Brummitt, 68) (Pacific Splendor x Semis de I. douglasiana) ; première victoire en grande compétition d’un iris de Californie.










PORTRAIT DE PAUL BLACK
par Tom Johnson

Paul Black est à l’heure actuelle l’un des plus grands obtenteurs d’iris. Son ami Tom Johnson en a fait le portrait en 2003, à l’occasion de l’attribution de la « Hybridizer’s Medal ». En voici la traduction. Depuis le palmarès de Black s’est encore accru comme cela était prévisible.

« Paul Black est né dans la partie N. O. de l’Oklahoma, dans une petite ville nommée Guymon. C’est un coin où il ne tombe pas plus de 12 pouces d’eau par an, avec un sol terriblement alcalin, ce qui n’en fait pas l’endroit rêvé pour quelqu’un qui aime les plantes. A la fin de ses années de lycée, Paul est allé à la faculté d’Oklahoma City. Il y a obtenu un diplôme de psychologie et de sociologie et une unité de valeur en commerce.
C’est à sa grand’mère Ruth Black que Paul dit devoir ses talents de jardinier. Il passait son temps chaque été à l’aider à cultiver ses légumes et ses fleurs. C’est aussi dans le jardin de sa grand’mère que Paul a commencé à s’intéresser aux iris. Ruth était une femme de mœurs spartiate, avec des moyens modestes, et les iris qu’elle faisait pousser lui avaient été donnés par une femme qui, à son émerveillement, dépensait parfois 20 ou 25 dollars pour un simple rhizome.

Quand Paul a acheté sa première maison, il s’est souvenu des beaux iris qui se trouvaient dans le jardin de sa grand’mère et il a voulu en planter. Après s’être rendu dans une jardinerie des environs, il a été dirigé vers une association iridophile locale et sa vente annuelle de rhizomes. Paul s’y est rendu et il a acheté quelques plantes. L’employé qui se trouvait là lui a dit que s’il conservait les noms de ces variétés il pourrait les faire participer à une exposition. Au printemps suivant, c’est ce qu’il a fait et il a gagné sa première récompense. Il était accroché !

C’est à une réunion de la Sooner State Iris Society que Paul a rencontré Cleo Palmer et Perry Dyer. Constatant l’enthousiasme de Paul ils ont commencé à l’encourager à se faire la main avec quelques croisements. C’est en 1979 qu’il a fait les premiers et il n’a plus cessé. C’est aussi en 1979 qu’il s’est lancé dans les affaires avec Perry Dyer, qui publiait déjà un catalogue pour son « Contemporary Gardens ». C’est un partenariat qui a duré deux ans. Paul a alors abandonné son travail régulier et a commencé son propre commerce d’iris. Le premier catalogue de « Mid-America Garden » est sorti en 81 et les premières introductions de Paul y ont figuré dans l’édition de 1982. Une de ces premières introductions fut un iris intermédiaire d’un jaune brillant nommé ‘Harlow Gold’. Il a bientôt été un « runner-up » de la Sass Medal et il est encore populaire aujourd’hui. ‘Tiger Print’ (SDB) a été introduit la même année a été le premier iris de Paul à obtenir un AM.

Paul a rapidement compris que sa classe d’iris de prédilection était les SDB. Ce fut un grand succès que de voir, en 82, la première fleur d’un semis numéroté 824 E. Paul a su tout de suite qu’il y avait quelque chose de spécial quand il a vu ces fleurs aux formes amples et bien arrondies. Cet iris a par la suite été nommé ‘Chubby Cheeks’ et été introduit en 85. ‘Chubby Cheeks’ est devenu l’une des variétés de tous les temps les plus utilisées comme parent. Il a permis à Paul d’obtenir sa première Médaille de Cook-Douglas. Ce fut pour Paul une année vraiment bonne car c’est celle de l’introduction du populaire IB ‘Red Zinger’ et du TB remontant ‘Blazing Sunrise’. ‘Bubbling Lace’, TB frisé bleu pâle, et ‘Undersea Adventure’, amoena inversé bleu, sont apparus en 86. En 88 ce fut le tour de ‘Glitz and Glitter’, un iris vivement coloré qui valut à Paul son premier Award of Merit pour un TB. La suite, ce fut le TB ‘Oklahoma Crude’, le SDB ‘Tu-Tu Turquoise’, absolument unique, et le MDB ‘Spot of Tea’ qui apporta à Paul sa première Médaille de Carpane-Welch.
Paul semblait dans une bonne passe, et en 1990 il lui est arrivé un tas de bonnes choses. Le TB ‘Sighs and Whispers’ a remporté un AM en même temps qu’il triomphait au concours de Florence. Cette année a vue également l’introduction du premier AB de Paul, ‘Prairie Thunder’ qui est arrivé à remporter la Médaille de William Mohr en 1998. C’est encore en 1990 qu’ont été introduits deux SDB importants en tant que parents : le magnifique fancy plicata ‘Privileged Character’ et le joli plicata ‘Transcribe’. Mais attendez, ça n’est pas tout ! Ce fut aussi l’année d’introduction du futur vainqueur de la Médaille de Cook-Douglas ‘Pumpin’ Iron’, et du futur vainqueur de la Médaille de Carpane-Welch ‘Cinnamon Apples’. Je vous disais que ce fut une grande année.
Les deux années suivantes ont été marquées par des choses intéressantes comme ‘Inky Dinky’ (SDB, 91) et ‘She Devi’l (AB, 92). C’est aussi en 92 qu’est apparu celui que Paul a baptisé à bon escient ‘Tweety Bird’. Il était tellement excité quand il l’a vu fleurir qu’il a aussitôt appelé Miss Kitty (Kitty Dyer), dont il dit qu’elle a été sa mère en matière d’iris, pour lui demander de venir vite le voir. Eh bien, elle a été dans une telle hâte de voir de quoi il s’agissait qu’elle a attrapé une amende pour excès de vitesse ! L’excitation de Paul à propos de ‘Tweety Bird’ n’était pas exagérée. Avec sa superbe forme ondulée et ses barbes orange, il allait devenir un parent aussi important que ‘Chubby Cheeks’. Il a raté d’un rien la Médaille de Cook-Douglas deux années de suite. Le populaire TB blanc ‘Goldkist’, avec ses épaules dorées et ses veines pourpres a été la vedette des introductions de l’année 1993. Il a obtenu un AM et s’est classé troisième et coloris le plus original au concours de Florence 1995.
En 1993 : tragédie, qui prend la forme de la pourriture des rhizomes. Des années de travail à Mid-America Garden sont perdues en quelques semaines. Beaucoup de merveilleux semis, près à être introduits ont été perdus. Il faudra attendre trois ans avant qu’une liste de grands iris soit de nouveau au catalogue.

En 1994, Thomas Johnson est arrivé du Canada et a pris sa place comme partenaire dans les affaires. Grâce à nos efforts conjoints, les iris barbus sont revenus au catalogue en 1996. Les TB ‘Tom Johnson’ et ‘Ruth Black’ sont apparus cette année-là. En 1997, c’est au tour du violet frisé ‘Lois Parrish’ et du BB ‘Apricot Toping’ à être introduits.

L’année 1998 une fois encore apporte des changements : l’entreprise a déménagé pour Salem, Oregon. Après des années de bataille avec de nombreux problèmes de climat et de maladie, Paul est enfin arrivé au paradis. De passionnantes introductions vont suivre. A noter parmi celles-là le TB ‘Deep Dark Secret’, le MTB ‘Blue Chip Stock’, les IB ‘This and That’ et ‘Sinister Desire’, et les SDB ‘Hot Jazz’ et ‘Hippy Skippy’. En 1999, les TB ‘Big Squeeze’, ‘Habit et ‘Vibrant’ sont mis sur le marché tout comme le MDB ‘Wiggle’.

Le début du nouveau siècle a vu la réalisation de variétés comme l’IB noir à barbe rouge ‘Devil May Care’ ou le plicata lacinié ‘Infinity Ring’. Il existe d’autres variétés remarquables comme les SDB ‘Artful’ et ‘Cachet’ et le délicat et ondulé MDB ‘Tingle’. Cette année-là a vu aussi l’introduction des TB ‘Keeping Up Appearances’ et ‘Dude Ranch’ ; par la suite celui-ci a valu à Paul son deuxième Premio Firenze.

Au fil des années les introductions de Paul ont été récompensées par un total de 93 HM, 22 AM, deux Médailles de Cook-Douglas, deux Médailles de Carpane-Welch et une Médaille de William Mohr. Elles ont également reçu 30 distinctions au concours de Florence, incluant deux Florins d’Or. Son activité ne donne apparemment aucun signe de ralentissement. Un coup d’œil au printemps dans ses planches de semis montre clairement que les SDB continuent d’être ses favoris. Paul a un coup d’œil fantastique pour distinguer les bons modèles et les bonnes couleurs, ses pairs peuvent en témoigner. J’ai vu ses semis, le printemps dernier, je puis dire que le meilleur est encore à venir. » (1)

(1) NDT : Depuis la rédaction de cet article, d’autres récompenses sont arrivées :
2004 = Carpane-Welch Medal pour ‘Dinky Circus’ (MDB)
Walther Cup pour ‘Cat’s Eye’ (SDB)
6 AM
2005 = 4 AM
2006 = 5 AM
2007 = Knowlton Medal pour ‘Go for Bold’ (BB)
6 AM
2008 = Cook Douglas medal pour ‘Cat’s Eye’ (SDB)
Walther Cup pour ‘Bluebeard’s Ghost’ (SDB)
6 AM
2009 = Cook Douglas Medal pour ‘Puddy Tat’ (SDB)
H J Sass Medal pour ‘Devil May Care’ (IB)
Randlph-Perry Medal pour ‘Dolce’ (Spec X)
Walther Cup pour ‘Bundle of Love’ (BB)
5 AM

15.1.10







LA COLLECTION DES MÉDAILLÉS

1975

On arrive dans “les temps modernes”; la liste des récompenses s’allonge.

DM : ‘Pink Taffeta’ (Rudolph, 68) (semis de Arctic Flame et Pink Ice), juste récompense du travail très scientifique de Nathan Rudolph, l’un des « papes » de l’iridophilie.

Wister Medal : ‘Sea Venture’ (B. Jones, 72) (Avis X Eternal Love), le premier “dark top” à obtenir une récompense marquante.

President’s Cup : ‘Skylab’ (N. Sexton, 74) ((Pacific Panorama x Celestial Snow) X Hidden Magic), un amoena de classe, comme tout ce qui vient de Neva Sexton.

Franklin-Cook Cup : ‘White Lightning’ (Gatty, 74) (Launching Pad X New Moon), tout le chic des obtentions de Joë Gatty.

Walther Cup : ‘Queen of Hearts’ (O. Brown, 74) ((Grandiflora x Christmas Time) X Buffy), une variété particulièrement réussie et originale, dont on a déjà parlé la semaine dernière.

FO : ‘Queen of Florence’ (Mallory, 76) ((Melodrama x Lynn Hall) X Arctic Flame), comme c’est arrivé quelques fois, le vainqueur de Florence est resté un illustre inconnu, devant ‘Royal Trumpeter’ (Reynolds, 71) (de Red Slippers, Barbizon, Fire Ruby...), un brun-rouge sombre qui a eu beaucoup de succès.

BDM : ‘Tyrian Robe’ (C. Hall, 69) (Redbourn x semis Fothergill), un iris pourpre qui n’est guère sorti de sa Grande-Bretagne natale.










LA FLEUR DU MOIS

‘Happenstance’

En janvier, que, pour le calendrier révolutionnaire français de 1793, le poète et peu recommandable Fabre d’Eglantine avait baptisé Nivôse, on a bien besoin d’un peu de lumière et de grâce. C’est ‘Happenstance’ (Keppel 2000) qui va nous l’apporter.

Etat-Civil :
Nom = ‘Happenstance’
Obtenteur = Keith Keppel
Enregistrement = 2000
Filiation = (Femme Fatale x ((Nefertiti x Playgirl) x Presence)) X Social Event
Description = MO – 95cm – Ondulé, rose tendre, légèrement frisé, sépales avec centre plus clair, épaules rose layette ; barbes corail clair.

Mes enfants diraient que c’est « un rose de chez rose », en utilisant cette forme moderne du superlatif curieusement imitée de l’hébreu (le Roi des Rois). C’est ce qu’en langage irisarien on qualifie de produit de l’endogamie : tous ses ancêtres sont roses. ‘Femme Fatale’ (Gatty 88) est un rose dragée aux fleurs amples subtilement ondulées ; ‘Playgirl’ (Gatty 77) ressemble beaucoup au précédent, un peu plus saumoné peut-être ; ‘Presence’ (Gatty 87) est tiré du même tonneau, avec une pointe de bleu qui en fait un rose orchidée remarquable ; ‘Nefertiti’ (Gatty 81) se distingue par un ton plus mauve aux sépales ; quant à ‘Social Event’, le « père », c’est un rose crémeux, délicieusement ondulé et frisé. Pour donner naissance à ‘Happenstance’, la nature a mélangé les deux teintes présentes dans les antécédents, de manière à rendre le rose plus vif tout en gardant les formes gracieuses et les bonnes qualités végétatives. Keppel est un hybrideur qui connaît toutes les ficelles du métier et qui sait d’instinct quelles sont les bonnes variétés à croiser pour obtenir ce qu’il envisage de créer.

‘Happenstance ‘ est une variété récente, mais elle a déjà des descendants enregistrés, tous roses, et tous admirables :
‘Guardian Angel’ (Keppel 2005), adouci de blanc au cœur, a la teinte délicate de la poudre de riz de nos grands-mères ; Guilt Free Sample’ (Black 2007) tire davantage sur le rose pêche avec une grosse barbe minium ; ‘Nuit de Noce’ (Cayeux R. 2008) a hérité son coloris fuchsia de son ancêtre ‘Hélène C.’ ; ‘Pinkity’ (Jedlicka 2009) est plus banal malgré le rose vif de son teint ; ‘Romantic Lyric’ (Ghio 2005) est une copie d’ ‘Happenstance’, sorte de clin d’œil par lequel le vieux copain Joë Ghio offre une sorte d’hommage à Keith Keppel : un hommage comme tous les fans d’iris voudraient pouvoir en rendre un à celui qui est aujourd’hui le maître incontesté des hybrideurs.
ECHOS DU MONDE DES IRIS

Bonnes adresses

Après le lien avec les nouvelles introductions de Ghio, voici ceux avec celles de P. Black et T. Johnson d’une part, et celles de Richard Tasco et Roger Duncan d’autre part. Prenez du plaisir !
http://www.mid-americagarden.com and http://community.webshots.com/user/rickt103

Allez aussi voir ça, ça n’est pas mal non plus :
http://hstrial-international308.intuitwebsites.com/






LE CARDIOLOGUE DU COLORADO

Chaque fois qu’on parle de la « révolution rose », autrement dit l’apparition de la couleur rose chez les grands iris, on parle de ‘Seashell’. C’est que cette variété de 1931 est l’une des toutes premières à se présenter sous cette couleur. Bien que de petite taille et d’une teinte un peu terne, cet iris a fait l’effet d’une bombe quand il a été présenté au public. Beaucoup ne voulaient pas croire qu’il s’agissait d’un vrai iris et non pas d’une imposture. Mais passés la surprise et les doutes, ‘Seashell’ est, en compagnie de ‘Morocco Rose’ et de quelques autres, dans le pedigree de presque tous les iris roses.

Ce pilier de l’hybridation, c’est le Docteur Philip Loomis qui l’a obtenu. Il s’agit du croisement d’un plicata avec un variegata tétraploïde (semis plicata X (W. J. Fryer x Ricardi)) qui a largement contribué à sa renommée, par ailleurs soutenue par d’autres réalisations majeures.

Philip Loomis est né en 1875 à Chicago. Il a fait des études médicales et a obtenu son diplôme en 1904. Mais au cours de ses études il avait contracté la tuberculose et, à l’époque, il n’existait aucun remède contre cette maladie. La seule chose à faire s’était de mener une vie absolument calme dans un endroit d’altitude, sec et ensoleillé, et d’espérer que le corps, aidé par le climat et le repos, finisse par triompher des bacilles. C’est cette médication qui a été prescrite à Philip Loomis. Il a donc acheté un billet aller-retour pour Colorado Springs et il est parti là-bas. Avec un flegme et une prudence très britannique, il s’était muni d’un aller- retour car il n’avait pas l’intention de rester dans ces montagnes et qu’il valait mieux être sûr de pouvoir revenir. Il s’est installé dans une caravane, en pleine montagne, et il a suivi rigoureusement les recommandations de ses médecins. C’est ainsi qu’il a guéri.

Finalement il s’est plu à Colorado Springs et a mis au fond de sa poche son billet de retour. Il a ouvert un cabinet médical, s’est marié, a terminé sa spécialisation en cardiologie et est devenu l’un des plus éminents cardiologues du Colorado. Il fut le premier à installer un appareil d’électrocardiographie à l’ouest du Mississipi.

Venu l’heure de la retraite, le professeur Loomis s’est décidé à consacrer son temps de liberté à son hobby, les iris. Très rapidement son jardin est devenu un des lieux de rendez-vous des amateurs d’iris du Colorado et des Etats voisins.

‘Seashell’ n’était qu’un début. Le plus haut fait d’arme en matière d’hybridation qu’ait réussi le Professeur Loomis est sans doute ‘Elmohr’ (1942), une variété moitié TB moitié AB, qui a eu un retentissement considérable et a obtenu la Médaille de Dykes en 1945. Cet honneur n’a fait que confirmer la réussite commerciale de la variété et l’opinion respectueuse de toute la profession.

Philip Loomis était une personne exigeante envers lui-même. Il n’a enregistré qu’un faible nombre de variétés car il considérait toujours son travail comme trop imparfait pour être immortalisé. On ne connaît plus de lui maintenant que son iris blanc ‘Spanish Peaks’ (46), son plicata bleu ‘Castle Rock’ (52) ou son jaune safran ‘Aspenglow’ (56) qui a reçu la President’s Cup en 1963.

Il n’a jamais utilisé son ticket de retour à Chicago. Il est simplement parti en 1969, après 94 ans d’une vie intéressante, comme on en trouve tant dans le petit monde des iris.

8.1.10

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Ghio
Si vous voulez voir les dernières variétés de Joë Ghio, allez à l’adresse suivante :
http://montereybayiris.org/gallery/ghio10.shtml










LA COLLECTION DES MÉDAILLÉS

1974

DM : ‘Shipshape’ (Sanford Babson 69) (Pacific Panorama x Epic). Un grand classique, apprécié de tous.
President’s Cup : ‘Loudoun Lassie’ (George Crossman 72) (Lady of Loudoun x Pretty Carol)
Franklin-Cook Cup : ‘Queen of Hearts’ (Opal Brown 74) ((Grandiflora x Christmas Time)x Buffy). Cette variété très élégante et vigoureuse a failli obtenir la DM en 81 ; c’est dire ses qualités.
FO : ‘Sunset Sky’ (Bernice Roe 69) (Pink Dresden x Judy Marsonette). Cette variété a connu une belle carrière commerciale, notamment dans notre pays où elle a été longtemps en vente.
BDM : non attribuée.










LA MANUFACTURE DE MOSCOU

Jusqu’à la fin des années 70, on citait volontiers comme exemple de capharnaüm commercial le catalogue de la Manufacture de St Etienne, rebaptisée Manufrance sur la fin de ses jours. On y trouvait de tout, y compris les choses les plus improbables, avec des anachronismes des plus savoureux comme certains vêtements avec « modèle renforcé pour explorateur » ! C’est à cet exemple d’éclectisme surprenant auquel me fait penser le travail de l’hybrideur russe Sergeï Nikolaïevitch Loktev. Dès la fin du totalitarisme communiste dans les pays d’Europe de l’Est on a assisté à une montée en puissance impressionnante de l’engouement pour les iris dans ces pays longtemps privés de contacts avec l’Occident et dans lesquels les velléités de culture des iris étaient bridées par la difficulté à se procurer le matériel génétique indispensable. La Russie s’est placée au premier rang de cette frénésie d’hybridation. Malgré l’ingratitude de son climat elle s’est mise à produire de nouvelles variétés d’iris selon un rythme effréné. Cette évolution a fait ici l’objet d’une chronique baptisée « Cap à l’Est », publiée ici en décembre 2004. Aujourd’hui c’est la production de Sergeï Loktev qui va être examinée.

Il a commencé à travailler dès la chute du rideau de fer et je fus peut-être le premier occidental à cultiver un de ses iris, avec ‘Drevni Rim’ qu’il m’apporté en 95 et qui date justement de cette année-là. Comme ses compatriotes et voisins, il hybridait alors à partir de variétés anciennes parvenues on ne sait comment dans les pays de l’Est. ‘Drevni Rim’ est un croisement de (Bang X Stepping Out), mais on trouve aussi chez lui des croisements comme (Wine and Roses x Rippling Waters) ou (Siva-Siva X Petite Posy) et quelques autres du même acabit. Cette période héroïque a duré jusqu’à ce qu’il dispose d’un stock de variétés américaines et australiennes suffisant, c'est-à-dire jusqu’au début du XXIeme siècle.

Dès qu’il a pu, il a abandonné son métier de garagiste, vendu son entreprise familiale, et s’est intégralement consacré à sa passion. C’est autour d’une datcha moscovite qu’il a installé son jardin d’iris, et il faut croire qu’il y dispose d’un grand espace vital pour réussir à cultiver autant de variétés et à produire chaque année autant de nouveautés.

Parce qu’il y a longtemps qu’il a quitté le statut d’entreprise artisanale. J’ai fait le compte : depuis 2000, c'est-à-dire en neuf années, il a enregistré 444 variétés nouvelles ! Personne au monde n’en a fait autant. Il s’intéresse à toutes les catégories : iris nains, intermédiaires, grands… Il ne se spécialise dans aucun coloris, aucun modèle ; en cela il fait mentir la règle qui veut qu’on ne puisse faire du bon travail qu’en choisissant un (ou quelques) thème de recherche et en s’y tenant. C’est en cela que sa pépinière fait penser à la Manufacture de St Etienne ! Rien ne l’arrête. Du temps du communisme triomphant il aurait sûrement été honoré comme stakhanoviste de l’iris ! Les croisements qu’il a réalisés sont à peu près innombrables, parce qu’il ne fait pas comme Barry Blyth, en Australie, qui enregistre des kyrielles de frères de semis : presque à chaque nouvel enregistrement correspond un nouveau croisement. Certains sont tout à fait originaux et démontrent son audace en matière de choix génétiques. On trouve de nombreux croisements intergénérationnels comme (Deltaplane X (Rancho Rose x Sketch Me)), des associations osées comme (Helga's Hat X Sultan's Daughter) – IB x TB -, des choix très internationaux comme (Dark Passion X Polvere di Stelle)…

Il sélectionne les fleurs de toutes les couleurs et de tous les modèles : plicatas, luminatas, amoenas, variegatas, bicolores ; il n’y a guère que les maculosas (ou broken color) qui ne l’ont pas encore inspiré… Et parmi tout ceci des formes de fleurs très dissemblables, avec ou sans ondulations, avec ou sans frisures, avec ou sans éperons… Les quelques photos jointes à cet article donnent une idée de ses iris qui ne comportent aucune « marque de fabrique » spécifique. En parallèle on peut s’étonner de trouver pêle-mêle des fleurs qui relèvent de l’esthétique des années 60 et d’autres très contemporaines d’aspect. Et l’on ne sait rien des plantes qui portent ces fleurs hétéroclites puisqu’elles ne franchissent pas encore les frontières de leur pays d’origine en raison de contraintes douanières héritées de l’empire soviétique. Il dit lui-même qu’il y a dans son travail beaucoup de choses qu’il aurait fallu éliminer, mais qu’au moment du choix il ne sait pas freiner son enthousiasme.

Sergeï Loktev est bouillonnant et inclassable. Il se déclare lui-même « iris dreamer », et il est vraisemblable qu’il ne saura jamais résister à la puissance de ses rêves.