3.4.09











DU PREMIER AU DERNIER

Jusqu’à il y a peu, je croyais que l’inventeur des iris « maculosas » ou « broken color » était Allan Ensminger et que sa première découverte d’un maculosa datait de 1967. Et puis j’ai découvert ‘Corsage’ (Watkins 56).

Edward Watkins ? aurait-on parlé de lui sans ‘Eleanor’s Pride’ et la D.M. qui lui a échu en 1961 ? Cet hybrideur discret a du pourtant passer pour un révolutionnaire quand il a enregistré ‘Corsage’. Pensez ! Un iris blanc, mais avec des marbrures aléatoires d’un beau jaune d’or ! Dans les années cinquante, cela n’a pas pu passer inaperçu, à moins que les juges de l’époque n’aient délibérément décidé qu’il n’y avait rien à voir dans cette étrange fleur. D’ailleurs ils ne lui ont attribué aucune récompense : pas le moindre petit HM, rien.

Aujourd’hui, où l’on est habitué aux excentricités onomastiques de Brad Kasperek et à ses ‘Kickapoo Kangaroo’ ou ‘Serengeti Spaghetti’, tout comme aux bizarreries de ‘Autumn Years’, totalement bariolé, on se dit que ce ‘Corsage’ était bien timide dans ses audaces.

Etait-il vraiment le premier ? Sans doute pas, et les frères Sass avaient remarqué des iris bariolés dans leurs semis, mais ils les avaient rejetés sans ménagement car ils considéraient ces iris comme des monstres qu’il fallait absolument éliminer. ‘Corsage’ n’est pas le premier iris « maculosa » obtenu, mais peut-être le premier à avoir été enregistré.

Son pedigree est plutôt original, lui aussi : un double croisement réciproque ((Katharine Larmon x Ola Kala) x sib) X ((Katharine Larmon x Ola Kala) x sib), formule qui ne donne pas souvent des rejetons présentables. Tout le mode connaît ‘Ola Kala’ (Sass J. 42 – DM 48), un iris d’or parmi les plus célèbres et les plus répandus. On n’a pas beaucoup d’informations sur ‘Katharine Larmon’ (Graves 41), un iris blanc, enfant de notre ‘Jean Cayeux’ souvent utilisé aux Etats-Unis à cette époque, qui s’est montré bien discret. Son seul titre de gloire, jusqu’à preuve du contraire, pourrait être ce ‘Corsage’ qui réunit, dans un apparent désordre les couleurs de ses deux parents principaux. Un fond blanc comme ‘Katharine Larmon’, des éclaboussures dorées, comme ‘Ola Kala’. Le mystère est dans cette répartition anormale des couleurs. Les BC actuels résultent de plicatas qui auraient un gène de plus ou de moins c’est selon. Mais dans le cas de ‘Corsage’ il n’y a pas de plicata à l’horizon. On peut peut-être alors parler, comme certains l’ont fait pour un autre iris un peu particulier, ‘Ming Dynasty’ (Moldovan 70), de l’action d’un virus qui viendrait perturber la répartition normale des couleurs. La génétique des iris en est encore plus aux supputations qu’aux certitudes scientifiques.

De ‘Corsage’ au semis de Loïc Tasquier dont il va être question maintenant, il s’est écoulé un peu plus de cinquante ans. Pendant ce temps les BC ont cessé d’être considérés comme des brebis galeuses, et si aucun n’a encore remporté la distinction suprême d’une DM, ‘Millenium Falcon’ (Kasperek 98) a tout de même été déclaré en 2008 « Meilleur Grand Iris » (Wister Medal), et ‘Baboon Bottom’ (Kasperek 93) en 2002, puis ‘Anaconda Love’ (Kasperek 98) en 2006 ont enlevé la Knowlton Medal des iris de bordure (BB).

Le semis de Loïc Tasquier est issu de deux SDB : ‘Ruby Eruption’ (Chapman 97) est un très classique plicata pourpre sur fond crème, ‘Double Byte’ (Sutton G. 96) relève plutôt de la catégorie variegata avec un fond jaune pâle orné sous les barbes blanches d’une empreinte brun-grenat. Dans le croisement de ces deux variétés il y a effectivement les éléments nécessaires à l’obtention de semis aux couleurs brisées, mais aussi de simples plicatas richement colorés. En l’occurrence on est devant un BC dont on n’est pas obligé d’apprécier la couleur, mais qui apporte du nouveau dans son genre et qui confirme l’influence grandissante des maculosas dans le monde des iris.

Désormais le modèle BC – je préfère dire maculosa – se présente dans toutes les tailles d’iris sauf peut-être les tout petits MDB. Le plus grand nombre se trouve chez les BB, mais les IB sont bien représentés - voir ‘Aardvark Antickz’ (Kasperek 98) - et les SDB commencent de l’être comme en fait preuve le semis aujourd’hui présenté, mais qui a des semblables chez d’autres hybrideurs, y compris Kasperek.

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