7.4.07







VOUS AVEZ DIT OUZBEK ?

C’est la victoire de ‘Ikar’ (Volfovitch-Moler 92) au Concours de Florence en 1995 qui a attiré l’attention des curieux sur ces iris venus des steppes de l’Asie Centrale. Du temps de l’Union Soviétique personne n’imaginait qu’on s’intéressait aux iris au-delà du rideau de fer. Pourtant, malgré les incroyables difficultés qu’ils avaient à se procurer des cultivars en provenance d’Europe de l’Ouest ou des Etats-Unis, un certain nombre d’irréductibles s’acharnaient à la culture d’une plante qui, a priori, n’était pas faite pour leur contrée. C’est qu’en Pologne ou en Russie, on est loin du climat de la Californie ou de l’Oregon ! Mais puisque au Nebraska ou dans le Colorado on parvient à les faire pousser, pourquoi pas à Moscou ou à Tashkent ? C’est là-bas, dans la République d’Ouzbékistan, qu’un citoyen russe, transplanté en ces terres lointaines pour raison professionnelle, s’était lancé dans la culture des iris, et dans leur hybridation. Son nom ? Adolf Volfovitch-Moler. Sa profession, ingénieur agronome.

De quel matériel génétique ce monsieur disposait-il pour ce lancer dans l’hybridation, dans les années 80 ? Bien peu ! A peu près une dizaine de variétés des années 50/60 ! Il les a croisées entre elles, dans tous les sens et comme il s’agissait d’iris de valeur, à puissant pouvoir génétique, déjà utilisés en abondance par les Américains dans les années 60/70, il a obtenu quelques plantes tout à fait valables. Evidemment ce n’était ni ‘Titan’s Glory’ ni ‘Beverly Sills’, encore moins ‘Silverado’ ou ‘Edith Wolford’, mis sur le marché à la même époque, mais des iris un peu démodés mais tout à fait présentables. Les douze variétés enregistrées en 1992, aussitôt que cela a été possible grâce à l’ouverture des frontières, proviennent de seulement huit géniteurs :
- ‘Rippling Waters’ (Fay 61 – DM 66), unicolore lilas
- ‘Pipes of Pan’ (O. Brown 63), bicolore crème/pourpre
- ‘Broadway Star’ (Schreiner 57), bicolore crème/amarante
- ‘Dancer’s Veil’ (Hutchison 59 – BDM 63), plicata bleu
- ‘Siva’Siva’ (J. Gibson 62), variegata-plicata
- ‘Sable Night’ (Cook 50 - DM 55), violet-noir
- ‘Vitafire’ (Schreiner 68), brun rouge
- ‘Buttercup Bower’ (Tompkins 60), unicolore jaune.

Quatre de ces douze iris, méritent, à mon avis, de retenir l’attention.
‘Ikar’, bien sûr, pour ses qualités horticoles et son délicat coloris mauve très pâle, un peu plus vif au cœur ;
‘Simfoniya’, pour sa robustesse, sa haute taille, et son ton rose lilacé très séduisant ; de plus c’est une variété tardive bien utile pour une fin de saison (photo) ;
Le brillant variegata ‘Tashkent’, en jaune paille et bordeaux ;
‘Vostochny Ornament’, autre variegata, au teint clair, avec une forme traditionnelle mais bien tournée (photo).

En 95, ‘Babie Leto’ est arrivé. Cet enfant de ‘Pink Sleigh’, a déjà un aspect plus moderne et une couleur bien à lui ; en deux tons de magenta.

Deux variétés de 99 sont particulièrement intéressantes : le violet sombre ‘Carnival Night’, très ondulé, et le bicolore ‘Rah-Rah Boys’, très original en rose et orange.

De 98 j’apprécie particulièrement le grand iris vieil or ombré de brun ‘Zolotaya Korona’.

En 2000, l’apparition d’’Abadiyat’ (photo), en mauve améthyste, finement frisé, marque une nouvelle étape. Il est le fruit de ‘Visual Art X Persian Berry’, et n’a plus rien à envier aux variétés américaines issues des mêmes parents comme ‘Feature Attraction’ (Schreiner 94) ou ‘Quiet Friendship’ (Gaulter 90).

Adolf Volfovitch-Moler aurait aimé utiliser les possibilités de la biotechnologie pour obtenir des iris franchement nouveaux, mais il n’a jamais disposé des moyens lui permettant cette recherche à laquelle le prédisposait sa formation scientifique. Il a du se contenter des éléments traditionnels dont tout le monde dispose. D’ailleurs nul ne sait si un jour la biotechnologie servira la cause des iris. Les recherches entreprises à ce sujet par Rick Ernst, aux Etats-Unis, en vue d’obtenir un iris rouge, n’ont toujours pas abouti et on se demande si elles déboucheront un jour sur quelque chose de concret.

Les iris d’Ouzbékistan sont des plantes traditionnelles. Auront-ils une suite ? Leur obtenteur est, hélas, décédé brusquement en 2002 et les croisements qu’il a effectués dans les dernières années de sa vie continuent d’être enregistrés par son fils, mais personne n’a pris jusqu’à présent la succession.

Aucun commentaire: