26.8.05

GWENNADEN
ou comment faire du blanc avec du bleu

GWENNADEN (Madoré 2001) est une plante qui a plus d’un mérite. Tout d’abord il faut souligner que ce n’est pas l’obtention d’un professionnel mais celle d’un pur amateur, passionné d’iris depuis des années et qui a eut le courage d’enregistrer quelques-unes unes de ses obtentions. Il a bien fait car ce GWENNADEN est une grande réussite. Les visiteurs de Franciris 2005 ont pu admirer cet iris qui érigeait ses hautes tiges, sans complexe, au milieu d’autres, d’origines plus fameuses. Il est même regrettable que le sort l’ait placé un peu loin du public, tout au bord du plan d’eau qui délimitait le fond de la plantation, et inapprochable par d’autres que les membres du jury. Ceux-ci ont toutefois pu d’autant mieux l’apprécier que ses fleurs d’un blanc de lait se détachaient admirablement sur le fond sombre de l’eau qui ciselait ses ondulations impeccablement tuyautées comme une coiffe bretonne.

En langue bretonne, gwennaden c’est cette blancheur sur la mer qui signale au pêcheur la présence d’un banc de sardines. Une blancheur qui, en quelque sorte émane du bleu de l’océan. On ne pouvait trouver un nom plus adapté pour cette fleur blanche, issue de deux iris bleus. En effet les parents de GWENNADEN sont HONKY TONK BLUES (Schreiner 88 – DM 95) du côté féminin, et SCANDIA DELIGHT (Schreiner 89). On ne décrit plus HONKY TONK BLUES dont le bleu marbré de blanc a fait le tour du monde, en revanche SCANDIA DELIGHT, bleu pervenche à barbes blanches, est nettement moins connu. L’un et l’autre sont des fleurs parfaites au plan esthétique, avec cette ampleur et ses ondulations gracieuses qui caractérisent les produits de la maison Schreiner. Ceux qui ont quelques notions de génétique des iris savent qu’un iris blanc provient essentiellement de deux blancs ou d’un bleu et d’un blanc. Si cette dualité n’est pas apparente à première vue chez GWENNADEN, elle se découvre très vite à la lecture de son pedigree. Rien de blanc, certes, du côté de HONKY TONK BLUES, si ce n’est une lointaine origine plicata (responsable des marbrures pâles qui donnent son caractère à cet iris original) où se cachent ROCOCO et ses antécédents SNOW CRYSTAL (Wills 49) et CAROLINE JANE (DeForest 51). Mais chez SCANDIA DELIGHT, le blanc n’est pas loin, et il a les meilleures origines. On peut ainsi partir du grand ancêtre que fut KASHMIRE WHITE (Foster 1912), passer par PURISSIMA (Mohr-Mitchell 27) à la génération suivante, puis suivre deux branches des descendants de cet iris un peu faiblard mais puissant au plan de la génétique. D’une part il y a eu une première branche qui a donné la lignée de blancs de Nouvelle Angleterre dont, à la quatrième génération, THE CITADEL (Graves), puis CONCORD TOWN (Buttrick 54), puis CUP RACE (Buttrick 63). D’autre part il y a eu l’inévitable SNOW FLURRY (Rees 39) d’où découlent REHOBETH (DeForest 53 – FO 57), POET’S DREAM (O. Brown 57), WINTER OLYMPICS (O. Brown 63 – DM 67) puis TUFTED CLOUD (Schreiner 71). CUP RACE et TUFTED CLOUD ont été croisés pour donner le grand-père de SCANDIA DELIGHT, et le tour est joué.

Du côté des bleus, l’ascendance n’est pas mal non plus puisqu’on y découvre GREAT LAKES (Cousins 38 – DM 41), ELEANOR’S PRIDE (Watkins 52 – DM 61), ALLEGIANCE (Cook 57 – DM 64), PACIFIC PANORAMA (N. Sexton 60 – DM 65), et plusieurs autres d’aussi bonne lignée.

Avec des ancêtres aussi prestigieux, il n’est pas étonnant que GWENNADEN ait de la classe. Son obtenteur, Gérard Madoré, n’a pas eu que de la chance : il avait mis tous les atouts de son côté et sa réussite ne doit pas tout au hasard comme c’est parfois le cas quand on évoque les variétés en provenance d’amateurs. Si j’avais un conseil à donner aux hybrideurs, je les inviterais à se procurer ce GWENNADEN et à l’utiliser sans retenue, pour profiter de ce que cette plante apporte au monde des iris en terme de robustesse et d’ondulation.

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