17.2.23

TOUT A UNE FIN

Ceci est la dernière livraison d'IRISENLIGNE. 

Après près de vingt-deux ans de publication et plus de 2800 posts ce blog s'éteindra. Pendant des mois j'ai cherché à me renouveler, à écrire des informations nouvelles, qui puissent retenir l'attention de tous. Mais je me rends compte que je ne fais que réécrire des articles sur des sujets rabâchés. Et que de toute façon le nombre de lecteurs s'est considérablement réduit ! Je remercie tous ceux qui m'ont accompagné pendant toutes ces années, et particulièrement celles et ceux qui m'ont fourni les remarquables photos qui ont illustré mes chroniques. 

Alors, Adieu IRISENLIGNE ...

A COMME ANFOSSO

C'est fini ! « Iris en Provence » c'est fini ! Tous les amis des iris ont été péniblement surpris d'apprendre il y a quelques semaines que la célèbre pépinière de Hyères fermait définitivement ses portes. Tout le monde considérait que cette institution était indestructible et personne n'envisageait qu'elle puisse disparaître. Cependant, comme toutes les choses humaines, Iris en Provence, après près de 50 ans d'existence, a quitté l'univers des amateurs d'iris. Un moment de réflexion teintée de nostalgie s'avère maintenant nécessaire. 

Un artiste peintre d'un certain renom, Pierre Anfosso, dans son village de La Crau, près de Toulon, collectionnait des iris dans son jardin. Son épouse Monique partageait cette seconde passion et elle a approuvé son désir de faire de celle-ci l'activité principale de la famille. Comme ils voulaient faire les choses en grand et sérieusement ils ont pris contact avec l'AIS et ce qui se faisait de mieux en matière d'hybridation : les obtenteurs Joseph Ghio, Keith Keppel ou Ben Hager, furent leurs professeurs pour leur enseigner le métier. Ils ne pouvaient rêver meilleurs maîtres. Ils ont appris non seulement les gestes nécessaires mais aussi les éléments de génétique indispensables pour agir avec un maximum de réussite. C'était au début des années 1970, et 1974 est née la pépinière « Iris en Provence ». Au début elle proposait essentiellement des variétés américaines. Il est vrai qu'à l'époque les obtentions françaises étaient peu nombreuses. Mais les Anfosso ont commencé à créer leurs propres variétés. Et tout le monde s'y est mis, parents et enfants ! 


Un premier succès est arrivé en 1978 avec 'Lorenzaccio de Medicis', création de Pierre-Christian Anfosso (fils) enregistrée l'année suivante ainsi que quelques autres variétés maison : 'Évasion', 'Bateau Ivre', 'Sanseverina', 'Nuit Blanche', 'Calamité', 'Maldoror' et 'Sonate D'O'. Ce bouquet splendide a surpris et séduit les collectionneurs français, mais également les grands hybrideurs américains qui ont pressenti qu'ils avaient affaire à des gens bourrés de talent. Désormais, et jusqu'en 1990 date à laquelle Pierre et Monique se sont retirés, on attendait chaque année avec avidité la sortie du catalogue d' « Iris en Provence ». Pour les nouveautés qui y étaient présentées, mais aussi pour le catalogue lui-même, véritable création d'artiste. 'Echo de France' (1984), 'Bar de Nuit' (1986), 'Voleur de Feu' (1988), 'Draco' (1988), 'Citoyen' (1989), 'Fondation Van Gogh' (1989) sont autant d'étapes dans une course familiale à la perfection qui n'est pas celle du nombre mais celle de la qualité. 



La retraite de Pierre Anfosso a marqué une pose dans la progression de l'entreprise. Son décès en 2004 a profondément affecté la famille qui cependant à poursuivi l'exploitation en la modernisant et l'enrichissant de variétés nouvelles tant françaises qu'étrangères. Un renouveau s'est fait jour en 2018 quand, après ses grands-parents Pierre et Monique, son oncle Pierre-Christian et sa mère Laure Anfosso, Marin Le May a présenté ses premières hybridations, des variétés très réussies – voir 'Terre d'Ocre' (2016) - qui ont réjoui les inconditionnels de la maison, heureux de constater cette sorte de renaissance.


 Quelques années plus tard, la pépinière a abandonné la vente d'iris racines nues, ce qui laissait présager ce qui c'est produit en 2022 : la fermeture pure et simple de l'entreprise, avec la retraite de Laure Anfosso... 

Il ne reste plus dans notre pays que deux pépinières majeures consacrées aux iris. Bourdillon a depuis longtemps ajouté d'autres activités à son activité mais poursuit la vente d'iris et même s'enrichit des obtentions maison signées de Nicolas, ce qui fait plaisir. Cayeux S.A., l'entreprise familiale qui a maintenant plus d'un siècle, maintient la production d'iris à un haut niveau, avec un développement international indispensable. Elle met avant tout l'accent sur les obtentions « maison », qui occupent maintenant une grande partie de l'offre. S'il n'existe plus que deux grandes pépinières vouées aux iris, auxquelles s'ajoutent deux ou trois affaires de moindre importance, c'est peut-être parce que la plupart des obtenteurs (et ils sont de plus en plus nombreux), grâce à la commodité du commerce en ligne, vendent leurs obtentions directement. Cela permet aux amateurs de disposer d'un choix assez considérable de variétés tant françaises qu'étrangères. On peut trouver des variétés américaines, mais aussi européennes et même ukrainiennes ou russes, ce qui est un net progrès par rapport au temps ou le choix se limitait aux américaines et au rares françaises de l'époque. En quelque sorte le choix s'est accru en même temps que le nombre de marchand diminuait ! Il faut s’accommoder de cette nouvelle situation qui correspond à l'évolution générale du commerce. 

La disparition de Iris en Provence reste néanmoins un événement majeur, et un peu triste, dans l'histoire du monde des iris.

11.2.23

ECHOS DU MONDE DES IRIS

Il y a quelques semaines je m'interrogeais sur le fait que les iris replantés dans un terrain où d'autres iris avaient vécu semblaient ne pas apprécier leur nouvelle implantation. J'invoquais la présence dans la sol d'une enzyme secrétée par les plantes en place précédemment. J'ai demandé son avis sur ce sujet à celui que je considère comme le meilleur connaisseur des iris , Keith Keppel. Voici sa réponse : « Lors de la replantation des champs d'iris, je préfère faire pivoter les zones utilisées, permettant au sol de rester en jachère à intervalles réguliers avant la replantation. Mais... ce n'est pas toujours possible, et je n'ai jamais vu échouer la prochaine plantation d'iris. 

 Il existe de nombreuses possibilités pour lesquelles les plantations ultérieures d'iris ne seraient pas aussi réussies. S'il n'y a pas de reconstitution des nutriments pour la croissance ou s'il y a un compactage du sol, ou peut-être la prolifération d'organismes nuisibles du sol, tels que des champignons ou des nématodes. Il s'agit d'un sujet tellement compliqué qu'il est impossible de proposer une réponse adaptée à toutes les circonstances."
 
 Autrement dit, aucune certitude ...

MAUVAIS JOUEURS

Tous ceux qui cultivent des iris savent qu'il y en a qui poussent vite et bien et d'autres qui ont un développement capricieux, lent, voire inexistant. C'est le cas pour toutes les plantes, mais les iris sont particulièrement sensibles à ces sautes d'humeur. Dès le début de ma vie d'irisarien j'ai fait ce constat et je me disais alors que je n'avais sans doute pas fait ce qu'il fallait. J'avais un peu honte de mes mauvais résultats. Et puis un jour je suis aller rendre visite à la pépinière Cayeux, et j'ai constaté que, entre deux touffes vigoureuses, il y avait un « trou », qui correspondait à une variété, dûment notée sur l'étiquette mais qui n'avait pas ou peu poussé. Ce fut une consolation, mais cela ne me donnait pas d'explications ! D'explications en fait il pouvait y en avoir plusieurs, qui parfois s'additionnaient. La plus simple, et même simpliste est celle qui vient à l'esprit immédiatement : « J'ai commis une erreur au moment de la transplantation ». J'ai appris que cela en effet pouvait être exact, mais j'ai appris aussi que les iris sont le plus souvent résistants et qu'ils pardonnent bien des maladresses ou des négligences ! Je raconte souvent le comportement de ces variétés oubliées un mois durant sur une table, racines nues, par un été chaud et sec, qui sont arrivées chez moi complètement desséchées, … et qui sont toutes reparties et ont fleuri l'été suivant. Cependant il est évident que tous les iris n'ont pas cette volonté de vivre. J'ai en mémoire bien des cas de reprises rachitiques et aussi d'échecs patents et inexplicables... En ce qui concerne les reprises laborieuses, en dehors de celles qui peuvent s'expliquer par des circonstances météorologiques peu favorables, les autres sont en général liées à la génétique de la plante. Il y a aussi des échecs qui paraissent inexplicables : la plante reprend, pousse doucement puis végète ; parfois après une belle reprise et un comportement automnal normal elle ne profite pas du printemps pour grandir et reste malingre, quelque fois pendant plusieurs années ! Je qualifie ces iris de mauvais joueurs et dans ma collection, qui a duré trente cinq ans, j'en ai connu un certain nombre ! 

 Par exemple 'Rustic Dance' (J. Gibson, 1979) ainsi d'ailleurs que de nombreux plicatas de cet obtenteur qui, après un démarrage normal et une première floraison intéressante, ont cessé de pousser et ont fini par disparaître après quelques années de galère . Ce fut le cas de 'Burgundy Brown' (1979), 'Mod Mode' (1970), 'Osage Buff' (1973)... 

 Les iris de Joë Ghio ont une réputation de fragilité qui s'est confirmée chez moi avec 'Financier' (1979) ou 'Wedding Vow' (1970). Tandis qu'un de mes préférés l'adorable 'Babbling Brook' (K. Keppel, 1965) n'a jamais voulu s'implanter sérieusement dans mon jardin ! Je l'ai renouvelé trois fois, mais il a disparu trois fois ! Et l'une des variétés les plus capricieuses que j'ai tenté de cultiver est 'Spellbreaker' (Schreiner, 1991) qui a végété pendant sept ou huit ans avant de fleurir magnifiquement ! 

 Une végétation capricieuse n'est pas l'apanage des iris « made in USA ». Aucune origine n'est à l'abri de ces caprices. Par exemple je me souviens de la pousse hasardeuse de 'Pretty Edgy' (Blyth, 2002), de 'Terra del Fuoco' (Bianco, 2005), de 'Ouragan' (R. Cayeux, 1995), de 'Bonte Kermis' (L. Tasquier, 2010) et même de ma propre obtention 'Kir' (2003) que j'ai perdu deux fois et récupéré grâce à une touffe exportée chez un ami, à 5 kilomètres de sa terre d'origine, où elle a prospéré allègrement. 

 Tout ceci ne répond pas à une quelconque logique. C'est à peine si certaines productions sont connues pour les fragilités de leurs obtentions. La nature peut se montrer capricieuse et les amateurs d'iris doivent accepter cette situation avec la patience qui, de toute façon, caractérise les bons jardiniers. 

 Illustrations : 


'Rustic Dance' 


Financier' 


'Spellbreaker' 


'Pretty Edgy' 


'Kir'

3.2.23

VUE DE PRAGUE, CLASSIFICATION DES IRIS BARBUS DE JARDIN

Dans un post publié récemment sur Facebook le grand botaniste et horticulteur tchèque Milan Blazek a expliqué comment il classe les iris en fonction de leur période d'apparition. 

 « À Průhonice (1), nous utilisons la catégorisation suivante : 
 - 1. Les iris barbus des jardins anciens : ce sont des clones qui existaient avec certitude ou du moins très probablement il y a 200 ans, avant le début des travaux d'hybridation sélectifs systématiques et qui, plus tard, firent l'objet de croisements précisément ciblés. 
- 2. les cultivars historiques, c'est à dire les iris qui ont été multipliés ou du moins mis en culture en tant que variétés nommées au XIXe siècle et dans le premier quart du XXe siècle, jusqu'à la décennie 1920-1930. 
- 3. les cultivars modernes : il s'agit de cultivars développés depuis 1920-1930, date à laquelle une nouvelle phase de sélection beaucoup plus intensive a eu lieu. 
- 4. Les iris de nouvelle génération introduits en culture à partir des années 1970, lorsque l'hybridation a commencé à atteindre des qualités supérieures, tels que nous les connaissons aujourd'hui. 

 Les iris de chacune de ces catégories ont des caractéristiques qui, lorsqu'on a acquis expérience adéquate, permettent de placer tout iris inconnu dans le temps avec une précision de 10 à 20 ans. C'est parce que l'hybridation a été pratiquée par des personnes qui connaissaient le travail des autres obtenteurs et savaient donc ce qui pouvait être apprécié que ces classements ont été possibles. (...) » 

 Ce système de classement, qui suit l'évolution des obtentions dans le temps, a le mérite d'être plus logique que celui en vigueur actuellement qui veut que tout iris introduit depuis plus de dix ans est un iris historique. 

 (1) Průhonice est le nom de la localité de la banlieue de Prague où se situe de jardin botanique dont Milan Blazek fut le directeur.

LA FLEUR DU MOIS

'Titvan' 
 Anton Mego 2000 
'Honky Tonk Blues' X 'Rustler'. 

 Pourquoi choisir cette variété pour illustrer le travail d'Anton Mego ? Cet hybrideur slovaque qui est considéré comme l'un des plus talentueux de sa génération, a déjà à son actif 110 variétés enregistrées, dont certaines ont atteint le plus haut niveau dans les compétitions où elles ont été engagées, Alors pourquoi se pencher sur une qui est restée discrète et n'est connue que d'un petit nombre de collectionneurs ? Réponse : parce que c'est la première à avoir été enregistrées ! Et aussi parce qu 'elle en vaut bien d'autres et qu'elle présente des qualités qu'on rencontrera dans toutes les futures obtentions d'Anton Mego. 


 Cet Anton Mego, homme discret, a en quelque sorte pris la succession de Ladislav Muska, celui qui a personnifié l'apparition de l'iridophilie en Europe Centrale après l'effondrement de l'univers soviétique. C'est un obtenteur actif , avec 110 nouvelles variétés (essentiellement des TB) depuis 2000. C'est aussi un obtenteur qui n'a pas traîné avant de s'imposer sur la scène internationale : 'Slovak Prince' (2002), deuxième variétés enregistrées, a fait le plus beau parcours qu'on puisse réaliser : apparu aux USA en 2003, chez Terry Aitken, il a obtenu un HM en 2005, une AM en 2007 et la Wister Medal en 2009. C'est la plus haute récompense qu'un iris non-américain puisse obtenir ! 

 'Titvan' n'a pas connu les honneurs américains. C'est, pour tout dire, un galop d'essai. Il est décrit comme :  « Waved satiny purple, falls with violet spot; beards amber, yellow in throat. », en français « Pourpre satiné et ondulé, spot violet sur les sépales ; barbes ambre, jaune dans la gorge ». Autrement dit un bel iris violet profond. Ses parents ne sont pas des inconnus : 'Honky Tonk Blues' (Schreiner, 1988), bleu clair marbré, a reçu la Médaille de Dykes en 1995 ; 'Rustler' (Keppel, 1987) s'est arrêté au niveau des Awards of Merit, ce qui ne retire rien à ses qualités. On peut s'étonner que le croisement d'un iris bleu avec un iris rouille puisse aboutir à une variété violette . C'est là le résultat de mélanges génétiques sur plus d'une douzaine de générations. Une analyse détaillée de ce cocktail révélerait certainement les origines de ce coloris apparemment inattendu. 



 Dans mon jardin 'Titvan' a poussé de bon cœur. La touffe a vite pris des proportions majestueuses et la floraison s'est poursuivie d'année en année jusqu'au transfert de la collection vers d'autres cieux... C'est donc une variété solide, vigoureuse et florifère, ce qui est une autre caractéristiques des iris d'Anton Mego. 

 Côté descendance, le bilan est maigre : une seule variété comporte 'Titvan' dans ses ancêtres. Et c'est un de ces iris aux couleurs étranges que l'on voit se développer ces temps-ci. 'Fantastical' (Mego, 2020) est décrit comme ceci : « amethyst violet, greyed yellow influence; (…) falls yellow, darker at edge, wide wisteria blue blaze extending down from beard; beards yellow-orange, large pale yellow flounce, wisteria blue on underside » soit « violet améthyste avec une influence de jaune grisé ; (…) sépales jaune plus foncé au bord, avec une zone bleu glycine s'étirant à partir de la barbe ; barbes jaune orangé terminées par une grand appendice jaune au revers bleu glycine. » Un coloris bien au goût du jour et qu'on retrouve chez d'autres variétés signées Mego, comme le déjà fameux 'The Majestic' (2016). 


 'Titvan' n'est pas une variété qui saute aux yeux dans un jardin. Mais pour qui sait distinguer un bel iris au milieu d'un grand nombre d'autre, il n'y a pas de doute !



28.1.23

QUAND PASSENT LES COULEURS

Régulièrement j'entends des gens se plaindre de ce que leurs iris dégénéreraient. C’est même une opinion franchement encrée chez certains qui voient peu à peu disparaître les belles couleurs des variétés qu’ils ont plantées dans leur jardin. A chaque fois que la question m'est posée, j'explique que cette dégénérescence n’est pas possible. Mais je ne suis jamais sûr d'être compris ! Une nouvelle fois, je vais expliquer pourquoi la dégénérescence des iris n'existe pas. 

 L’iris se reproduit par graines, mais se multiplie par prolifération à partir d’un rhizome. À l’extrémité du rhizome, et sur les côtés de celui-ci se développent des yeux qui vont donner naissance à de nouvelles pousses exactement identiques à la plante-mère car les cellules de chaque œil contiennent tous les gènes de la plante. Tous les spécialistes des iris sont d’accord là-dessus et ils expliquent la soi-disant dégénérescence par différents incidents de culture. 

 Dans un court article publié dans la revue Iris et Bulbeuses (N°113 – Été 1994), Jean Cayeux, qui, mieux que personne connaissait les iris, trouvait trois raisons possibles de la disparition progressive des coloris d’origine. Il commençait par faire le point sur les doléances le plus souvent formulées. : 

- L’uniformisation des couleurs. 
 Les plaignants constatent que dans une bordure composée à l’origine de variétés de différents coloris, au bout de quelques années n’apparaissent plus que deux ou trois couleurs ; - Le « retour » à un coloris bleu uniforme. 
- Autre déception : dans des fleurs qui ont perdu également leurs belles ondulations et la fermeté de leurs tépales, les fleurs nouvelles sont d'un bleu, moyen, anonyme ; 
- L’apparition de nouveaux coloris. Des fleurs d'un coloris le plus souvent terne ou délavé remplacent les brillants coloris initiaux. 
Ces constatations aboutissent en général à affirmer qu'il s'agit de signes évidents de dégénérescence. 

 Jean Cayeux s'est attaché à démontrer que les causes de ces anomalies avaient une toute autre origine. Dans le premier cas il disait que l’uniformisation des couleurs s’expliquait par les différences de prolificité et de rusticité des variétés. Si une plante se développe plus vite et plus fort que sa voisine, elle va peu à peu étouffer celle-ci ou la priver de nutriments, de sorte que la plus faible va cesser de fleurir, voire disparaître. Dans le fouillis d’une plantation ancienne, ou trop serrée, on ne saura plus distinguer les pousses de la plante robuste de celles de la plante chétive, et l’impression d’uniformisation sera bien réelle : malheur aux faibles ! 

 La seconde doléance appelait de sa part le commentaire suivant : si le bleu gagne du terrain ce n’est pas non plus une illusion. C’est le fait de la réapparition, dans la bordure, d’anciens iris diploïdes (germanica ou pallida), dont quelques morceaux de rhizomes seraient restés en place, et, compte tenu de leur prolificité, auraient étouffé les autres iris. 

 Pour le troisième cas, l’apparition de nouveaux coloris, plus pâles que les coloris d’origine, n’est pas à proprement parler dégénératif, c’est le produit de semis « sauvages ». Si par malheur ont laisse venir à maturité une capsule issue d’une insémination naturelle, les graines vont tomber au sol et certaines vont germer. Jamais on n’obtiendra par ce moyen des fleurs identiques à leurs parents, mais le plus souvent des rejetons plus ou moins bien formés et pâlichons qui laisseront croire qu’il y a eu dégénérescence. Et, en quelque sorte, c’en est une : pour conserver à des hybrides comme les iris modernes leurs coloris initiaux, il ne faut pas les laisser se reproduire ; seule la multiplication rhizomateuse garantit la réapparition des qualités de la plante d’origine. Ses enfants sont, comme ceux des humains, tous différents de leurs parents, et c’est la banalité qui l’emporte. 

 Autre démenti : Certains prétendent que ce serait une « sécrétion » des racines qui aboutirait à faire dégénérer les iris lorsqu’ils sont plantés trop serrés, mais ceci est de la plus haute fantaisie. S’il y a effectivement production d’enzymes, ceux-ci n’ont nullement le pouvoir d’apporter une modification génétique. En revanche ils ont celui d’inhiber la pousse de nouveaux iris plantés à l’emplacement de variétés retirées. Si l’on veut remettre des iris dans une plate-bande où il y en a déjà eu, il faut attendre quelques années, le temps que les enzymes laissés dans le sol se dissipent. Sinon les plantes mises en place végéteront longtemps avant de se développer normalement. Une autre solution, radicale, est de substituer à le terre fatiguée un apport de terre n'ayant pas porté d'iris depuis longtemps ! 

 Alors répétons que les iris ne dégénèrent pas. Leur multiplication végétative leur garantit une existence qui, dans les meilleures conditions, est équivalente à l'éternité ! On trouve toujours des hybrides apparus lors des débuts de la culture horticole des iris, il y a 180 ans... C'est le cas de 'Jacquesania' 'Jacques (1840) ou de 'Madame Chéreau' qui a été enregistré en 1844. Certes, beaucoup des variétés très anciennes ont disparu, mais ce n'est pas le fait d'un affaiblissement de leurs caractères, mais des aléas de leur culture ou de l'abandon de celle-ci par les jardiniers parce que des variétés plus modernes leur ont été préférées. Par ailleurs certaines variétés n'ont pas eu de chance, comme le très joli 'Callela' (Muska, 1990) qui a été détruit dans le jardin même de son obtenteur, quelques années après son apparition. Autre incident qui peut être fatal : le « blooming out ». Joë Ghio m'a annoncé lui-même que son 'Cutting Edge' (1993) avait subi ce triste sort dans sa propre pépinière... Dans ce cas la mort de la variété n'est pas certaine puisque des pousses plantées dans d'autres jardins peuvent exister, heureusement ! D'autres phénomènes naturels peuvent amener la disparition d'une variété. Ce sont là des mésaventures naturelles. Mais qu'il ne faut pas mettre sur le compte d'une dégénérescence...






21.1.23

LE PLUS GRAND ? (II)

Après avoir qualifié Keith Keppel de «  plus grand hybrideur de tous les temps » j'ai eu quelque remords. Ce propos n'est-il pas un peu excessif ? J'ai pensé en effet à certains autres qui auraient pu mériter ce qualificatif, ou, tout au moins, quelque chose d'approchant. Et en particulier à Joseph Ghio, exact contemporain de Keppel et ami de celui-ci. Or, sur ces entrefaites, Christine Cosi, cette remarquable collectionneuse d'iris, a publié sur Internet une série de photos de variétés signées Joë Ghio. Je me suis alors demandé quel niveau de reconnaissance devrais-je avoir pour cet grand maître du monde des iris. 

 Iris Encyclopedia dresse un rapide portrait de Joë Ghio, dont voici la traduction : « Il est né à Santa Cruz (Californie) en 1938, son père était pêcheur tandis que sa mère était issue du milieu agricole. En 1953, Ghio, alors adolescent, est tombé sur un exemplaire d'un catalogue présentant les 10 meilleurs iris de l'année et a été immédiatement fasciné par les couleurs, ainsi qu'il l'a déclaré. Il a commandé une collection de 5 dollars de rhizomes. Après avoir étudié l'hybridation, Ghio a commencé à créer ses propres plantes en 1954, et il n'a jamais arrêté, même en poursuivant d'autres activités exigeantes. Avec un diplôme en éducation commerciale, Ghio a déménagé à Hayward en 1960, où il a accepté un poste de professeur de commerce et d'histoire au lycée. En 1967, il est retourné à Santa Cruz et a accepté un poste d'enseignant à la Harbour High School. Au milieu des années 1970, il est entré en politique locale. Il a été maire de Santa Cruz en 1975, 1977 et 1980. Il a également siégé au conseil municipal pendant trois mandats. Mais c'est l'iris qui a toujours captivé son imagination. En 1980, il a reçu la Dykes Medal pour 'Mystique'. Il a déclaré qu'il désirait remporter de nouveau cette médaille mais elle lui échappe jusqu'à présent. » 

Voilà la différence ! Les iris de Joë Ghio n'obtiennent que très peu de reconnaissance de la part des juges américains. Pourquoi ? Seuls les spécialistes de la question peuvent donner une réponse certaine. A notre niveau, on ne peut faire que des conjectures. Dans la littérature irisarienne on note cependant des commentaires qui révèlent que les iris signés Ghio sont fragiles et souvent capricieux. Est-ce là la raison du désamour des juges à leur égard ? 

De point de vue strictement horticole chacune des créations de Ghio est un chef d’œuvre. Une parfaite connaissance de la génétique et un sens inné de la perfection aboutissent à un iris que l'on ne peut qu'admirer. Déjà dès son apparition 'Mystique' avait stupéfait les amateurs. Il y a des milliers d'iris bleus excellents, mais le bleu de 'Mystique' était exceptionnel et a été reconnu comme tel par les juges qui lui ont attribué la Dykes Medal. Mais depuis, malgré près de 400 variétés de grands iris enregistrées, plus aucune distinction suprême. Les plus belles récompenses obtenues sont allées à 'Starring' (1999) qui a reçu la Wister Medal en 2007 et est monté sur le podium de la DM, à la troisième place, en 2008. Ensuite 'Magical' (2007) a obtenu une Wister Medal en 2014. C'est tout. 

Il faut dire néanmoins que la grande maîtrise de Joë Ghio a été parfaitement reconnue dans la catégorie des PCN (Pacific Coast Native) où il règne absolument. Depuis 1979 il a reçu 29 fois la plus haute distinction, la Sydney B. Mitchell Medal ! C'est formidable, même si la concurrence est moins relevée que dans le domaine des grands iris (TB). Il faut dire aussi que chez les iris de bordure (BB) trois de ses variétés ont été honorées de la Knowlton Medal, la plus haute distinction de cette catégorie : 'Junior Prom' (1966) en 1994, puis 'Niche' (2006) en 2015 et 'Boy Genius' (2011) en 2022. Ce sont de belles consolations. 

Quand il aura vaincu le signe indien qui l'écarte depuis tant d'années des plus hautes distinctions chez les TB, Joë Ghio devrait s'imposer tout comme l'a fait son ami Keppel. Deux sortes de TB pourraient lui valoir ce retour en grâce : les iris blancs et les iris « rouges », deux couleurs dont il est un maître, mais le temps joue en sa défaveur. 

Dès le début de sa carrière Joë Ghio a proposé des iris blancs.'Nina's Delight' (1962) en est la preuve. Cela a continué jusqu'à nos jours et l'on peut citer 'Bridal Shower' (1965) puis 'Wedding Vows' (1970). La série a repris avec 'Bubbles Galore' (2001) suivi quelques années plus tard par 'Forever Blowing Bubbles'(2006) et 'My Beloved' (2008). Au cours des années 2010 il y a eu 'Civility' (2012) et 'Heavenly Host' (2013). Enfin tout récemment ce fut le tour de 'Christmas Spirit' (2021). En comparant les photos de ces variétés on constate l'évolution de l'apparence de ces iris. Cela suit ce qui se passe chez tous les obtenteurs et la comparaison entre le premier et le dernier de la liste est édifiante. 




On pourrait faire le même constat chez les iris roses, une autre spécialité de Joë Ghio, mais j'ai préféré me tourner vers les somptueux iris brun-rouge ou pourpre-rouge qu'il affectionne particulièrement. 

Il en a proposé à peu près une nouvelle variété chaque année depuis 'Lady Friend' (1980). Et surtout à partir de 1993 où est apparu 'Battle Royal' au grenat profond et à la forme séduisante mais qui n'a pas dépassé le niveau HM dans la course aux honneurs. ‘Rogue’ (1994), plus clair, n'a pas eu plus de succès auprès des juges. Pas plus que ‘Star Quality’ (1995), plus violacé. 'Vizier' (1997) a eu plus de chance puisqu'il aura un AM en 2003. Ces variétés sont superbes à tous points de vue, et à partir de ‘Ritual’ (1998) on atteint une sorte de perfection. En témoignent 'Regimen’ (1999), ‘Ransom Note’ (2000) et son frère de semis ‘Cover Page’ (2001). 'House Afire’ (2002) et ‘Infrared’ (2002) sont là pour apporter la preuve que les années ne freinent ni l'énergie, ni l'habileté de Joë Ghio. 'Trial by Fire' (2005) et son frère de semis 'Red Skies' (2006), descendants de 'House Afire', continuent la série, de même que 'Iconic' (2009). Le classement de ces variétés dans la course aux honneurs, somme toute assez décevant, ne tient sans doute pas compte de l'apparence de ces fleurs mais plutôt de leurs qualités végétatives, connues pour être délicates. Ces plantes largement consanguines, sont fragiles et poussent souvent difficilement ailleurs qu’en Californie. Elles permettent cependant de découvrir que Joë Ghio, en grand maître des iris, sait merveilleusement jouer avec les couleurs pour obtenir ce qu’il veut. 





Finalement, qu'est-ce qui différencie Keith Keppel et Joseph Ghio ? Ce n'est certainement pas le talent d'hybrideur, pas davantage la qualité intrinsèque des plantes produites. Il faut sans doute chercher cette différence dans la réputation du premier à fournir des iris solides, fidèles et résistants, alors que les iris du second déçoivent souvent leur possesseurs par leur fragilité et leurs caprices. Cela, les juges en ont acquis la conviction par tout ce qu'ils entendent dire par les amateurs. Ils en tiennent compte dans leur notation, et là où une variété signée Keppel obtiendra une récompense majeure, une variété Ghio stagnera au mieux au niveau des Awards of Merit.





13.1.23

ECHOS DU MONDE DES IRIS

97 

C'est le nombre de variétés françaises notées sur le site de la SFIB et enregistrées en 2022, par 16 obtenteurs différents. 

 Il fut un temps où les irisariens français considéraient que les iris qu'ils obtenaient n'étaient pas dignes d'être enregistrés. Seul la famille Cayeux, fière de son passé glorieux, osait franchir le pas, puis vint Jean Ségui, puis quelques autres audacieux comme la famille Anfosso... Mais ce n'est que depuis une dizaine d'années que le nombre des enregistrements français a décollé. Notre pays fait maintenant partie des plus productifs. C'est en partie du au fait que les obtentions de qualité sont devenues plus faciles mais aussi à celui que les jeunes hybrideurs ont pris conscience de ce que leur travail n'avait rien à envier à celui des autres , quelle que soit leur nationalité. 

A côté de ces seize français, onze variétés belges, et quarante-trois variétés néerlandaises ont été compilées en compagnie des variétés de notre pays. 

Cette masse comprend une grosse majorité de grands iris (TB) puisqu'ils sont 87/97, émanant de douze hybrideurs. 



Trois cas très particuliers : 

- parmi les 30 enregistrements demandés par Roland Dejoux, la plupart concernent la formule « Iris-Box » qui permet à n'importe quel acquéreur d'un nouveau semis de choisir le nom qu'il entend donner à celui qui devient ainsi « son » iris ; 


- 5 variétés, dont 3 TB sont au nom de Lawrence Ransom, décédé il y a quelques années, mais cultivées et sélectionnées par le même Roland Dejoux ; 


- Une variété est une obtention de Michèle Bersillon, qui n'utilise pas les services du « registrar » français.

LA FLEUR DU MOIS

'Vive la France' 
 Jean Cayeux, 1993  
('Condottiere' x 'Delphi') X ('Alizés' x ('Condottiere' x 'Lunar Rainbow')) 

Floraison en fin du milieu de saison. Pétales blancs ; sépales bordés d'un large liseré bleu moyen avec un grand centre blanc ; barbes rouges. 

 La présentation de cette variété dans le catalogue Cayeux de 1994 est la suivante : « Pétales réellement blanc, sépales bleu aniline vif à cœur blanc sur lequel se détache une fière barbe rouge orange. » Dans le numéro 101 de « Iris & Bulbeuses », cette description est complétée par : « ...cet iris approche les couleurs du drapeau français. Étant le fruit de longues recherches, il arrive deux ans après le bicentenaire de la révolution. Mais quelle récompense quand on voit ses grandes fleurs, élégantes, solides, impeccablement présentées sur de belles hampes florales ! » A lire ces phrases on ne peut pas n'y pas voir une allusion à 'Révolution' (Pierre Anfosso, 1988) mis sur le marché en 1989. La maison Cayeux a certainement vu dans cette apparition un « coup » commercial ! Elle a constaté qu'elle avait été précédée par son confrère provençal ! Mais il est vrai qu'avec 'Vive la France' elle a dépassé son rival. Les pétales de 'Révolution' ne sont pas franchement blancs, et, d'une façon générale, 'Vive la France' est une variété plus réussie. 

Pour en arriver là Jean Cayeux a fait usage de son cluster favori : 'Condottiere' x 'Delphi'. Un croisement que l'on retrouve dans 12 variétés différentes comme 'Rebecca Perret' ou 'Sixtine C.', et en particulier toute la série de tricolores dont 'Vive la France' est le premier. 'Bal Masqué' (J. Cayeux, 1993), 'Ruban Bleu' (J. Cayeux, 1997) sont les étapes suivantes, avec 'Parisien' (1995) qui est de la génération suivante. 

'Alizés' puis un autre cluster : 'Condottiere' x 'Lunar Rainbow', présent dans 6 variétés Cayeux, complètent le pedigree. 

Côté descendance 'Vive La France' s’enorgueillit de six rejetons. Tous issus du même croisement, et enregistrés par un certain M. Ung, de Los Angeles, dont la description officielle est la même mais dont on n'a pas de photos ! Une situation étrange et inhabituelle ! 

'Vive la France' n'est peut-être pas le meilleur de la série des tricolores de Jean et Richard Cayeux mais il a le mérite d'avoir ouvert une nouvelle porte, vers quelque chose d'encore inconnu mais qui allait avoir beaucoup de succès. 

Illustrations : 


'Vive la France' 


'Révolution' 


'Delphi' 


'Lunar Rainbow'

8.1.23

beautés 2023

 Thomas Johnson est sans doute l'un des hybrideurs les plus doués. Son art s'affine d'année en année.  Cette fois il nous propose des fleurs qui sont certainement parmi les plus belles jamais obtenues. Appréciez !






QUOI DE NEUF, DOCTEUR ?

Le monde des iris évolue. Il ne fait en cela que se comporter comme tous les autres petits mondes! Des gens disparaissent, d'autres viennent rejoindre le gros de la troupe... Un coup d’œil au dernier palmarès de l'AIS témoigne de cette évolution. On y voit certains obtenteurs confirmer leur progression, on voit de nouveaux noms apparaître, qui nous laissent subodorer ce que seront les palmarès des années à venir. 

 Tout d'abord il faut noter que les médailles et places d'honneur continuent d'être trustées par un petit nombre de grands hybrideurs qui sont là depuis de longues années. Cette liste comprend, sans qu'il soit question d'établir un quelconque classement autre qu'alphabétique :
- Terry Aitken 
- Paul Black 
- Joseph Ghio 
- Keith Keppel 
- Thomas Johnson 
 - Larry Lauer 
- Stephanie Markham 
- Linda Miller 
- John Painter 
- Marky Smith 
- Hugh Stout 
- Michael Sutton 
- Richard Tasco 
auxquels il faut ajouter l'inévitable famille Schreiner. 

Tous sont cités un grand nombre de fois, ce qui témoigne de leur importante activité et de la qualité de leur travail. Quelques noms n’apparaissent qu'une fois, mais leur présence est constante depuis plusieurs années : ce sont soit des amateurs éclairés soit des obtenteurs dont les produits sont très peu distribués et donc peu vus par les juges. Mais quelques noms s'imposent peu à peu et deviendront sans doute incontournables dans les années à venir. A mon avis c'est le cas de Tom Burseen et de Douglas Kanarowski. 

 Tom Burseen n'est pas un débutant. Il a même une longue carrière d'hybrideur derrière lui. Dans « Iris Encyclopédia » il est présenté de la façon suivante : « Tom Burseen hybride des iris à Grand Prairie, Texas. Il est bien connu pour ses nombreux grands iris barbus qui ont des noms intéressants ! Il se qualifie lui-même de « savant fou » lorsqu'il s'agit d'hybrider des iris dans son magnifique terrain ; son jardin est connu de tous comme « Le Laboratoire ». Et quand on dit « ses nombreux grands iris » on emploie un euphémisme puisqu'il y en a environ neuf cents ! C'est donc un vétéran de l'hybridation. Cependant son travail, qui a commencé à la fin des années 1980, ne s'est pas imposé du jour au lendemain. Ses créations avaient peut-être un air de déjà vu, à moins que ce ne soit les noms délirants qu'il leur a donnés qui n'aient pas plu aux juges, plutôt classiques dans leurs appréciations. Toujours est-il qu'il a eu du mal à s'imposer. Aujourd'hui sa réputation est acquise, et 'Notta Lemon' (2009) s'est hissé jusqu'à la Wister Medal en 2018. Depuis, ses variétés apparaissent dans tous les palmarès, c'est pourquoi l'on peut dire que, désormais bien considéré par les juges, il peut avoir encore de l'avenir, et pourquoi pas espérer la consécration suprême d'une Dykes Medal puisqu'il a plusieurs variété en compétition à ce niveau, comme le très sage et très joli 'Prissy Christy' (2014). 



La carrière de Douglas Kanarowski est toute différente. Elle n'a débuté qu'en 2010 et n'a a son actif que trente-six variétés. Mais plusieurs de celles-ci ont atteint très vite le niveau des Award of Merit et 'Tijuana Taxi' (2014) a reçu une Wister Medal en 2022, alors que le nom de Kanarowski apparaît cinq ou six fois dans la liste des variétés primées. A ce rythme là, ce nom devrait rapidement faire partie des plus connus du monde des iris. Le prochain lauréat sera-t-il ce 'Zebra Butter' (2017) au coloris délicat et original, à moins que cela ne concerne ce 'Big Badda Boom' (2020) au nom aussi improbable que la fleur est plaisante ? 




Quelques autres candidats s'installent dans les listes de lauréats. C'est le cas, entre autres, de Mike Lockatell - voir 'Metro Blue' (2013) – ou de Howard Dash – voir 'Gold Dust Woman (2018). Tout cela démontre que l'iridophilie a toujours de beaux jours devant elle>. Il faut s'en réjouir.